Grand bal 2017 de Youssou N'Dour : le triomphe était total... presque !
Dimanche 1er Janvier 2017, il est 21heures à peine. L’entrée du CICES de Dakar grouille de monde. Pas seulement devant le CICES d’ailleurs, sur la VDN, la route qui mène à la Foire, les voitures avancent difficilement. Que se passe-t-il ? C’est Youssou N’Dour qui est en concert ce soir : le traditionnel grand bal du 1er janvier. Après Thiès et Mbour, la star va offrir le même spectacle à ses fans de la capitale.
Une fois n’est pas coutume, les dakarois semblent ponctuels et disciplinés en envahissant assez tôt le lieu du concert. Avec un spectacle qui commence généralement vers 01 heures du matin, arriver à 21 heures, est une sacrée prouesse pour qui connaît le rapport conflictuel du sénégalais au temps.
Malheureusement, tous ceux qui se sont pointés à cette heure n’avaient que trop raison. Malgré quelques légères bousculades, tous ont pu accéder à l’enceinte où devait se produire Youssou et le Super Étoile. Par contre, ce qu'il s’est passé les heures qui ont suivi, est tout simplement indigne eu égard à la dimension de l’artiste.
En plus des 25.000 ou 30.000 spectateurs déjà entrés, dehors se tenait selon les organisateurs près de 20.000 personnes, pass en main, et qui se démenaient tant bien que mal pour pénétrer dans le saint des saints. Frictions, vols, agressions de toutes sortes, se sont déroulés devant des forces de l’ordre en nombre insuffisant et donc naturellement vite dépassés.
« Hé les enfants rentrons à la maison, je n’ai pas payé 5 billets à 20.000 FCFA pour qu’on m’agresse. J’étais sortie avec mes amis pour passer un bon moment, pas pour me faire tuer. Même si je peux comprendre que des désagrements arrivent, là c'est trop » dit une dame dégoutée et très en colère. Un autre spectateur renchérit « Je viens de perdre mon téléphone mais je dis Al hamdoulilah parce que dans des conditions d’organisation aussi mauvaises, tout est possible, tout peut arriver. Dieu seul nous protège et je crois que le Sénégal est béni ».
Le sentiment général est le dégout, la lassitude et surtout la colère. Amère façon de débuter 2017. Ils voulaient le commencer dans l’optimiste en venant voir le concert de Youssou N’Dour, la mauvaise organisation les précipite dans un doute profond… « 2017 année de malheur pour nous ? En tout cas ça commence mal, très mal, je ne retrouve même plus mes billets d’entrées » lance, fataliste, un monsieur accompagné de son amie qui elle a perdu une chaussure et est complètement décoiffée.
À qui la faute ? Au premier chef Youssou N’Dour bien évidemment. Si on ne peut tolérer cela de la part de Pape Diouf, Wally Seck ou Queen Biz, encore moins de Youssou N’Dour qui a rempli toutes les salles de la planète et qui est une icône mondiale. Seulement, à la Cour du roi, chacun y est pour soi.
Des pass ont été vendus de façon anarchique, le dispositif pour sécuriser le public et le faire entrer sans « bobo » a été inopérant. Le public africain mérite d’être mieux traité. Malheureusement, la récurrence du phénomène au Sénégal, des gens qui viennent à un spectacle, qui payent leur place et qui repartent avec des bleus ou avec le sentiment d’avoir été méprisé, n’autorise aucun espoir quant à sa résolution.
En novembre dernier, Youssou N’Dour a sorti un album fort touchant, plein d’optimisme sur l’avenir de l’Afrique. Africa Rekk cela passe aussi par montrer qu’on est capable d’organiser de gros évènements. Bien sûr, Youssou n’est pas organisateur au sens exécutif du terme, mais les responsabilités doivent être situées.
Ceci dit, le concert en lui-même a été un triomphe. Le spectacle était phénoménal. Finalement, quand on voit Youssou sur scène, à l’aise, sûr de son fait, une seule réflexion nous vient à l’esprit : ce gars récolte 30 ans de travail, 30 ans pendant lesquels, lui et son groupe, en plus des tournées internationales, jouaient au minium 3 fois par semaine dans les clubs de Dakar.
C’est la somme de toutes ces prestations qui fait que Youssou N’Dour et le Super Étoile sont un des groupes au monde, avec Kassa'v et les Rolling Stones, qui donnent les meilleurs concerts. 3 heures durant, il a donné du bonheur aux personnes qui avaient réussi à entrer. En fusion avec son public, il le laissait chanter et lui, prenait visiblement son pied en entendant près de 25.000 en choeur rependre systématiquement les refrains de ses chansons. La belle voix de Suadu, choriste magnifique sur « Be Careful » notamment avait de la concurrence. Quel artiste cracherait sur un tel succès ?
Du côté des musiciens, Mbaye Dieye Faye, le percussionniste, toujours égal à lui-même a fait bouger le public et l’a gratifié en compagnie de Thio Mbaye de belles chorégraphies en percussions. À la basse, Thierno Sarr, une belle découverte celui-là a été aussi très présent, pareil pour le guitariste Moustapha Gaye qui prend de plus en plus de place et affiche de plus en plus une grosse confiance. Ses envolées sur « Ndakaru » et surtout « Jegel nu » en ont bluffé plus d’un…
Youssou N’Dour aux anges, a enchainé les tubes. Pêle-mêle : « Birima », « Lett meu », « Attou », « Serigne Fallou », « Lima Wessu » son duo magnifique avec Akon, dans lequel, le public prend la place du chanteur sénégalo américain pour un gros moment de délire. Un des temps fort du concert. Autre temps fort, le fantasque lutteur Yaou Dial dansant sur le célèbre rythme du champion Gris Bordeaux.
L’arrivée surprise sur scène de Gallo Thiello ancien danseur de Youssou N’Dour a enchanté le public. Avant que Youssou ne monte sur scène, Elaj Keita et Momo Dieng ont joué chacun un morceau. Momo Dieng a également fait une belle performance. Peu avant ces deux nouveaux talents de la musique sénégalaise, la première partie a été assurée par le duo Pape & Cheikh, qui, en prélude à leur soirée du 6 janvier prochain au Grand Théâtre, ont fait étalage de tout leur talent.
C’est vers 4 h du matin que You a entamé « Samay niit » littéralement « Les miens » pour remercier ses fans et prendre congé… jusqu’à…. samedi prochain. En effet, devant l’organisation défectueuse, l’artiste, en plus d'une vidèo où il prèsente ses excuses, a promis de jouer en priorité pour tous les détenteurs de pass qui n’ont pas pu accéder au CICES.
Ces derniers sont même invités à se présenter au Thiossane (boîte de nuit de Youssou) pour échanger leur Pass. Seulement, on espère d’ici là, les dispositions sécuritaires pour l’accès au CICES seront prises afin d’éviter la situation autant désagréable que lamentable de samedi dernier pour l’image de l’Afrique.
En attendant, méditons ses belles paroles de la chanson « Exodus » de l’album Africa Rekk : « Li eup sunu rew yi gorgorlu wougnu dara…Woudé nimou leu guissé la lay euweulé… Ana kuko def way ? Gnun nio ko def … gni wara wax, wax nagnu, gni wara jeuf tocc di xulé… Ana kuko déf ? Gnun leu… « La plupart de nos pays (africains) ne font pas beaucoup d’effort spour améliorer les conditions de vie de leurs citoyens - L’Afrique sera respectée lorsqu’elle se respectera d’abord. Ceux qui doivent parler le font mais ceux qui doivent agir sont frappés d’inertie… L’Afrique est en retard : Qui est responsable ? Nous (africains) seuls... Mais j’ai foi en l’avenir l’Afrique changera positivement. »
Commentaires
s'identifier or register to post comments