La musique traditionnelle au Congo-Brazzaville
Par Anthony Mouyoungui
La musique traditionnelle désigne l'ensemble des musiques associées à une culture nationale ou régionale ou à une zone géographique.
Musiques orales et populaires, elles se transmettent à l'oreille, bien que certains groupes et musiciens actuels préfèrent les transcrire sur partition afin de les interpréter ou de les répertorier. Pour le cas du Congo, la transmission est plutôt orale même si, depuis quelques années, un nouveau genre est né à partir de cette musique traditionnelle : la musique tradi-moderne.
Mais, il faut savoir que la musique traditionnelle est la première forme de musique, elle existe depuis des lustres et est liée à la vie en société. Dans le cas du Congo Brazzaville, il faudrait parler de musiques traditionnelles car, plusieurs ethnies composent ce pays et chacune a sa musique et ses danses. Dans la tradition congolaise, musique et danse sont étroitement liées. Parler de musique suppose également parler de danse.
La musique traditionnelle est étroitement liée à la vie sociale.
Dans chaque ethnie, la musique et la danse sont présentes dans chaque circonstance de la vie : naissance, initiation, mariage, travaux champêtres, travaux ménagers, décès,…
Il est donc tout à fait difficile de situer, en termes de périodes, la naissance de ces musiques. Mais, ce qui est par contre certain, elle s’est transmise de génération en génération et, aujourd’hui, elle existe toujours. Plusieurs groupes de musiques sont répertoriés au Congo : Moukoukoulou National, Ndzobi Okoa, Elélé Ndzoro, Kongo Butiélé, Mvitsié, Okouakassa, Kingoli Akwa, Groupe traditionnel les Makandas, Ndima, Vocal Bantou, ou encore la compagnie Punta Negra qui mélange dans ses spectacles : danse, chant, et rire.
Chaque groupe représente une ethnie ; le rythme et le répertoire, héritages des ancêtres, sont donc propres à chaque ethnie particulière. Il est vrai qu’à travers les années, ils ont évolués et subis quelques modifications mais les fondamentaux sont restés les mêmes. Lorsque l’on écoute ces groupes chanter, l’on arrive facilement à identifier l’origine ethnique. Au cours de son évolution, la musique traditionnelle congolaise a utilisé, presque, les mêmes instruments. Les ngoma ou mbonda (tambours), les ngonfi, la guitare à cordes, la guitare à lames métalliques, le gong à deux tuyaux métalliques ou à un seul tuyau, des maracas faits de calebasses ou de boules sphériques séchées et évidées dans lesquelles on introduit des grains durs et secs produisant des sons lorsqu'ils sont secoués selon certaines cadences, le balafon, le tam-tam long ou court, épais ou mince.
A côté des peuples bantous, existe aussi des peuples autochtones que l’on a appelés pendant des années pygmées. Leur musique est différente de celle des bantous, les pygmées font ce qu'on appelle la polyphonie contrapuntique (ou contrepoint) et voulant dire ‘’note contre note’’. En plus, ils chantent en faisant du yodel, une technique de chant consistant à passer rapidement de la voix de poitrine à la voix de tête. Ceci n’est pas le cas chez les bantous. En ce qui concerne les instruments, les pygmées utilisent notamment la harpe-cithare, l’arc monocorde, l’arc à deux cordes, l’arc-enterre, la flûte à encoche et paire de sifflets,…
La musique traditionnelle, entre le naturel et le surnaturel
Dans la société congolaise, le naturel et le surnaturel sont très liés et, il est tout à fait normal que la musique, qui accompagne la vie quotidienne, illustre cela à travers les chants et danses. Certaines musiques ont pour vocation de créer des ponts entre le monde naturel et le monde surnaturel notamment dans les processus d’initiation, de guérison et de récolte. « La musique traditionnelle congolaise a, depuis la nuit des temps, un caractère ésotérique, sacré et mystique comportant deux dimensions intimement imbriquées et en interaction dialectique permanente ; deux dimensions relatives aux mondes visible et invisible, c'est-à-dire au couple matière-esprit qui est à la base du mystère de l'être humain » explique Jean Oba-Bouya.
L’on chante et danse pour solliciter l’intervention des dieux. Cela se faisait non seulement avec de la musique mais aussi avec des danses. Nous avons ainsi, des danses de guerrier, de chasseurs et des danses féminines (Tchikumbi chez les vilis et Nkira chez les tékés par exemple). Ces musiques typiquement féminines étaient jouées à l’occasion des rites au cours desquels, les jeunes filles pubères accéder au rang de femme responsable, d'épouse modèle, de femme-prêtresse. Elles étaient aussi utilisées à des fins thérapeutiques : soigner la stérilité par exemple !
Une nouvelle branche : la musique tradi-moderne
Dans son histoire, la musique traditionnelle congolaise n’a pas évolué en autarcie. Elle s’est enrichie de l’apport extérieur, du croisement avec d’autres cultures notamment au niveau des instruments. Créant ainsi un nouveau genre musical appelé tradi-moderne. Ce genre, qui a commencé à émerger dans les années 90, avec des groupes tels BBGM et Bane B’Siane à Pointe-Noire, a connu un véritable essor au début des années 2000 avec notamment TH Musica. L’immense succès rencontré par ce groupe qui chante en bembé a remis au goût du jour la musique traditionnelle modernisée. Ainsi, que ce soit à Brazzaville ou à Pointe-Noire, des groupes de musique tradi-moderne ont fleuri : Kingoli Authentique, Kibur’Kiri, Otswéré, Lang’i, N’Kota,…
Les succès de ces groupes dans le pays ont redonné de la vitalité à une musique traditionnelle qui, sur certains aspects, était devenue monotone. L’apport des instruments modernes a permis au genre de se redonner une seconde jeunesse sans pourtant se dénaturer ! Au contraire, l’intérêt pour la musique traditionnelle s’est accru. Les puristes voyant de très mauvais œil l’incursion du moderne de la tradition. Cependant, comme les autres genres de musiques, la musique traditionnelle connait de nombreuses difficultés à exister et à s’affirmer sur le marché du disque. La production étant non seulement insuffisante mais parfois de qualité moyenne. Ce qui rend impossible la conquête du marché national déjà lui-même très étroit.
Dans ce tableau peu reluisant, la musique traditionnelle bénéficie du soutien des médias tels que Télé Congo avec son émission Mbonda elela et des Feux de Brazza, le Festival Populaire et International des Musiques Traditionnelles, qui comme son nom l’indique se tient à Brazzaville tous les deux ans depuis 2005.
Sources :- Jean Oba-Bouya, publié dans Magazine N°565 Mai 2001 - L'Afrique centrale : http://www.lajauneetlarouge.com/article/la-musique-de-lafrique-centrale-le-festival-panafricain-de-musique-fespam-au-congo
- Chrysogone Diangouaya ‘’Documentaire sur les instruments de musique traditionnelle d’Afrique’’ ;
- Wikipédia ;
- http://www.adiac-congo.com ;
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