5 questions à Daniel Gomes
De passage dans les locaux de Music in Africa, l'artiste musicien Daniel Gomes, président de l’Association des métiers de la Musique au Sénégal (AMS) depuis avril 2016, par ailleurs leader du groupe Oriazul a bien voulu répondre à 5 questions formulées par notre équipe de rédaction.
1. L'actualité de l'AMS et les projets de l'association
Mr Gomes nous révèle que 17 ans durant, le principal challenge de l’AMS a été d’en appeler à un meilleur suivi juridique de la question du droit d’auteur au Sénégal, lequel droit n’était pas bien défini, puisqu'il ne s’appliquait qu’aux œuvres des artistes créateurs sans cependant considérer les contenus générés par les artistes interprètes et autres intervenants dans le milieu musical.
Cette lutte a finalement abouti à la mise en place d’un cadre juridique bien défini ayant favorisé la naissance de la société de gestion collective (SODAV) qui a remplacé le Bureau Sénégalais du Droit d’auteur (BSDA) pour assurer la défense du droit d’auteur et des droits voisins.
Cette première lutte remportée, l’AMS se penche à l’heure présente sur la préoccupante question de la rémunération équitable des artistes musiciens.
En effet, ces artistes évoluant dans l’informel car n’ayant pas un statut clairement défini, sont traités par ceux qui les emploient comme de simples prestataires, ce qui engendre un souci d’équité à l’heure de leur verser leurs dus. Mr Gomes estime qu’il faudrait jusqu’à 3 à 4 ans de travail encore pour faire valoir les droits des artistes et permettre à ce qu’ils soient traités comme des travailleurs à part entière, étant entendu qu’ils sont soumis aux mêmes exigences de vie que tout le monde.
Toutefois, l’AMS entend établir par des conventions collectives, des barèmes de rémunération pour tout type de prestation musicale, en attendant que les législateurs se penchent véritablement et sans précipitation sur la question du statut des artistes musiciens.
2. L'effectif de l'AMS
Depuis la création de l’AMS, elle a enregistré 3000 membres. Mais Mr Gomes précise que ce nombre est à relativiser car beaucoup d’artistes ne s’inscrivent que pour avoir la carte d’adhérent de l’association qui leur permet de se présenter en tant qu’artistes musiciens, sans cependant qu’ils ne s’impliquent vraiment dans les combats du groupe.
À l’heure actuelle, l’AMS compte donc 787 membres actifs à jour de cotisation, ce qui est une fierté pour Mr Gomes qui estime que rares sont les associations qui regroupent plus de 300 membres actifs.
Avec son combat pour la cause de la rémunération équitable qui concerne tous les artistes, L’AMS espère atteindre au moins 1000 membres actifs pour donner plus de poids à l’association de sorte qu’elle ait plus d’aisance à établir des conventions avec les employeurs et même avec les coopératives d’habitat ou autres structures.
3. Le numérique : chance ou menace pour les artistes ?
Mr Gomes voit le numérique comme le marché de demain, comme cette surface incontournable où les artistes pourront s’autoproduire et proposer leurs œuvres à une cible plus large.
Seulement, il déplore le retard de quelques-uns qui ignorent encore qu’avec le développement du numérique, une nouvelle économie de la musique s’est créée et qu’elle est à découvrir.
Ainsi pour lui, les artistes devraient se former sur cette question, sur les avantages de ce nouveau marché et plus encore sur ses dangers, notamment celui de la piraterie qui se développe à la même vitesse que la technologie et dont ils ne saisissent pas pour la plupart le régime juridique.
Sur cette question, il a bien voulu rappeler que l’AMS est également un conseiller juridique pour les artistes qui voient leurs œuvres spoliées. L’association milite aussi pour que les profits générés sur internet par la vente de la musique soient équitablement partagés entre les artistes et les sites distributeurs pour ne pas qu’il y ait d’injustice.
Il a salué l’investissement de l’artiste d’origine sénégalaise Akon dans la plateforme de diffusion musicale en ligne MusikBi, qui est une initiative de jeunes développeurs africains pour permettre aux artistes africains de vendre leurs musiques en ligne à des clients pouvant les acheter avec leur crédit téléphonique. Akon a acheté 50% des parts de la société, et sa vision est de permettre aux artistes de toucher jusqu’à 60% du patrimoine généré par la vente de leurs titres.
4. Ses goûts musicaux
Sur la question de ses goûts musicaux, Mr Gomes nous explique qu’il a une préférence particulière pour les musiques métissées. En tant que président d’une association d’artistes, il est dit appelé à suivre divers styles, à découvrir ce qui se fait sous différents cieux, à envisager des mixages et des mélanges. Il a dit son admiration pour des artistes anciens comme Souleymane Faye et Ndiaga Mbaye et pour Fefsy un jeune chanteur interprète.
Mr Gomes a également énuméré trois genres musicaux dont il raffole : l’acoustique, l’ethno traditionnel et surtout le reggae qu’il adore et qu’il a lui-même adopté au début de sa carrière.
5. Son actualité musicale
Mr Gomes dit que sa carrière musicale connaît un ralenti du fait de son engagement dans l’AMS qui lui prend du temps. Après deux albums en 1996 et en 2002, suivis d’un single pour l’Union Africaine en 2010, lui et son groupe ont passé après 7 ans sans rien produire.
Mais il promet qu’entre aout et décembre 2017, ils devraient sortir trois singles : un pour une école de Kizomba qui voudrait en faire son hymne, un autre en collaboration avec l’arrangeur Manu Lima, et un dernier tout en acoustique avec un producteur basé en Hollande.
Comments
Log in or register to post comments