La musique populaire en Guinée
La musique populaire en Guinée, de plus en plus, emprunte les rythmes et influences venues d’ailleurs pour l’agrémenter et l’édulcorer
- Sekouba Kandia Kouyaté fils de feu Sory Kandia Kouyaté
Jusqu’en 1996, un seul studio d’enregistrement existait à Conakry et ce dernier a su être à l’avant-garde du combat pendant de longues années.
Aujourd’hui, le contexte semble plus propice à un développement artistique tant bien par la multiplicité des studios que la diversité d’expériences des ingénieurs de son, autant d’arguments qui font que le pays tente tant bien que mal d’exporter sa culture musicale.
La présence à forte dose de reggae, hip-hop ou encore de zouk dans le paysage musical local témoigne de sa maturité.
Pendant longtemps, les orchestres hérités de la révolution guinéenne ont fourni de la matière première à la musique guinéenne. Sekouba Bambino Diabaté du Bembeya Jazz, Mamady Kala Camara et Youssouf Bah des Sofas de camayenne ou encore Abass Yansané de la même formation et qui lui est connu comme le concepteur du Funkady, genre musical métisse entre le Yankandi rythme local soussou et du funk ont porté haut les couleurs du pays.
Des artistes comme l’immense Sory Kandia Kouyaté ont aussi laissé à la postérité des héritiers qui ont su honorer la mémoire paternelle, Kabi et Kandia Kouyaté en font foi.
En région, des artistes comme Yaya Bangoura à Kindia ou encore Mouctar Paraya alias Mick à Labé ou Sona Djely Kouyaté à Kankan et Seyni Malomou en forêt ont fait et font parfois encore même aujourd’hui le bonheur des mélomanes. Ce vivier culturel sera propice à l’éclosion d’artistes comme Ibro Diabaté ou encore Petit Kandia le petit dernier de la liste est Kandia Kora qui continue sa conquête de la planète sur des airs de world music.
Des artistes comme Lama Sidibé ou Binta Laly Sow sont aujourd’hui, les derniers survivants d’une musique pastorale authentique tandis que Mory Djely Deen Kouyaté enchante encore les auditeurs de sa voix forte.
Côté hip-hop dès les années 90 certains pionniers comme : Bill de Sam, Kill Point, Légitime Défense ou encore Hamid Chanana ont montré la voie en signant un premier opus la même année. Point commun aux acteurs de cette génération, la revendication d’une certaine identité culturelle basée sur la force des mots et sur fond d’instruments de musique traditionnels emportant l’auditeur dans les dédales d’une Guinée unique et plurielle.
L’âge d’or du rap made in Guinée
La sortie en cascade des premiers albums de musique urbaine en 1996 et la continuité qui a suivi entre 1998 et 2002 constituent une sorte de période de grâce pendant laquelle les artistes étaient considérés comme des prophètes des temps modernes. Sogolon de Bill de Sam (premier album de musique urbaine de Guinée) le titre est historique car c’est le nom de la mère de l’empereur du Mandé Sunjata Keita, Fore Boma de Kill Point, Bakouti de Légitime Defense, 2 octobre de Hamid Chanana.
Ces albums seront complétés par ceux du groupe Pap Soul, Les voix du silence et du groupe Fac Alliance.
À partir de 2002, un certain renouveau va souffler sur le hip- hop guinéen et d’autres talents vont éclore et apporter du sang neuf et une nouvelle dimension au hip-hop guinéen. Degg J Force 3, Silatigui ou encore Mifa Gueya se feront les porte flambeaux de cette période avec des brulots qui ont encore droit de cité aujourd’hui.
Cependant cette génération dorée marquera un coup d’arrêt en 2005 et un passage de témoin entre ancienne et nouvelle écoles. Toutefois cette période connaîtra une pluie de productions musicales avec des albums, les uns plus ratés que les autres, bref un flop collectif.
La mort du message et le manque d’identité des artistes ont fini par avoir raison du hip-hop faisant rabattre les espoirs sur les artistes d’essence traditionnelle.
Le rap est mort vive le reggae
Pendant longtemps la musique de Bob Marley a manqué d’adeptes en Guinée, les premiers à s’y lancer ont porté la croix et balisé le chemin pour leurs cadets. Jah Max Mara, Antounk, Daddy Cool et Alpha Wess en tête de file ont essayé de convaincre sans trop de réussite.
Puis vint un certain Takana Zion, jeune artiste polyglotte et à la voix forte, longtemps en apprentissage auprès d’un multi-instrumentiste Manjoul Souletie et son équipe qui donneront une arrivée royale à l’album Zion prophet en 2007 révélant le talent brut du natif de Coyah au grand public. Depuis, le jeune homme n’a cessé d’enchainer les tubes et les distinctions ainsi que les collaborations et les scènes étrangères au grand bonheur de ses fans.
Cette rédemption musicale permettra de réconcilier les artistes avec leur public et verra s’ouvrir un certain intérêt pour le reggae et toutes ses variantes. Si Takana Zion et Lyricson ont les mieux vendu l’image du reggae guinéen hors des frontières du pays d’autres artistes comme Masta Hams, Ras Condel ou Elie Kamano ou plus récemment Singleton, Baba Samba et Gwada Maga se sont érigés en gardien du temple.
L’accidentelle introduction du R&B
Jusqu’en 2008, ce genre musical attirait peu ou pas de jeunes hormis dans les clubs, mais le succès fulgurant du jeune Soul Bang’s, lauréat du prix RFI en 2016 a servi de déclic et l’ancien imitateur des œuvres d’Akon ou Chris Brown a pris le chemin royal du succès en se faisant une vraie notoriété.
La divine importation du zouk et de la sensualité caribéenne
Depuis deux décennies les artistes guinéens ont osé franchir le pas et ceci leur a permis d’expérimenter un certain métissage qu’on aurait pensé impossible il y a quelques années. Aujourd’hui on parle de zouk manding, nul mieux que le « kleg » Fodé Baro n’incarne cette pigmentation avec des titres comme, « Yirikiki » « Mon amour » ou encore « Viens ce soir ».
Artiste world music depuis 2001, la constance de Fadjidi, à l’aise tant sur le rap que sur une « mamaya », rythme d’inspiration culturelle mandingue, mérite d’être saluée. « Respect your body » Son dernier single est tout frais et est disponible depuis une semaine.
Il faut noter que depuis une dizaine d’années, une poignée d’artistes et de groupes se disputent le succès sur la scène nationale. En musique urbaine, il est impossible d’ignorer Takana Zion et ses cinq albums en 10 ans avec un nombre incalculable de singles (Zion prophet 2007, Rappel à l’ordre 2009, Rasta governement 2011, Kakilambé 2012 et Good life en 2016) suivent de près les Banlieuz’art avec deux galettes placées sur le marché (Kounfayakoun en 2011 et le Voyage en 2015) et Singleton qui ferme la marche avec deux opus (« Gnakry Dance-Hall » en 2009 et « Le travail paie » 2017).
Autres artistes très attractifs Ibro Diabaté dont la valeur n’est plus à démontrer, Kandia Kora et Petit Kandia ,meilleur artiste live du pays , aussi se distinguent. Ainsi qu'Azaya qui prend prudemment ses marques. Impossible non plus d’ignorer le remarquable Oudy 1er en coupé décalé ou encore Sona Tata et Sia Tolno chez les dames.
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