Toute la maestria et le génie de Tony Allen en dix titres
Avec le décès à l'âge de 79 ans de Tony Allen, co-créateur de l'Afrobeat, le monde de la musique a perdu un batteur prolifique.
Connu surtout comme le batteur et directeur musical de Fela Kuti, son talent a révolutionné l'art de la batterie et créé la toile de fond pour que Fela présente son message révolutionnaire de panafricanisme.
10 chansons ne sauraient résumer la carrière de Tony Allen. Cependant, elles illustrent bien la polyvalence du musicien, qui a eu une immense influence dans le monde du rock, du punk, de la techno, du rap et de la musique pop.
« Moanin »
Allen était un admirateur de l'extraordinaire batteur américain Art Blakey, du groupe Jazz Messengers. Il s'est inspiré de lui pour perfectionner son art et apporter du nouveau au Nigeria. C'est donc sans surprise qu'Allen a rendu hommage à Blakey avec le titre « Moanin », qui est extrait de son EP A Tribute to Art Blakey, qui propose trois autres chansons des Jazz Messengers, interprétées en afrobeat.
« Roforofo Fight »
La chanson est extraite de l'album Roforofo Fight (1972), signé Fela Kuti. Avec ses 13 minutes, elle révèle toute la complexité de la batterie d'Allen. L'influence de James Brown s'entend fortement dans le strumming à la fois fin et nerveux de la guitare, tandis qu' Allen imprime son groove ondulant. Son jeu endiablé sur la caisse claire, ponctue parfaitement la diction énergique de Fela.
« The Good, the Bad & the Queen »
Le chanteur britannique Damon Albarn a invité Allen à rejoindre son groupe, The Good, the Bad & the Queen, pour la réalisation d'un album en 2007. Dans le morceau phare de l'oeuvre, dont l'intitulé reprend le nom du groupe, Allen joue le rôle du métronome ; il agrémente également la création avec des rythmes ouest-africains.
« Never » (Lagos Never Gonna Be the Same)
La chanson fait partie de Rejoice, album d'Allen réalisé avec le trompettiste sud-africain Hugh Masekela. Le morceau est une rencontre du jazz et de l'afrobeat, qui rend hommage à Kuti avec qui Allen a collaboré pendant des décennies, et qui a eu une puissante influence sur la vie de Masekela, tant musicale que politique. L'album est centré sur la batterie, la basse, le clavier et le bugle. On y entend également du saxophone sur trois pistes et des performances vocales de Masekela et Allen.
« Sounding Lines 1 »
Producteur de techno et percussionniste de formation, Moritz von Oswald a fait équipe avec Allen et le gourou du synthé modulaire Max Loderbauer, sur l'album intrigant et ambigu, Sounding Lines. L'une des qualités d'Allen est sa capacité à garder des grooves intéressants pendant de longs jams ; sur la piste d'ouverture de l'album, il en fait une démonstration. Il pose son joyeux afrobeat sur une ligne de basse bourdonnante de 10 minutes, pour créer une aventure électro frémissante.
« Wolf Eats Wolf »
Ouvert aux collaborations de tous genres, Allen aimait se perdre dans des labyrinthes rythmiques et essayer de nouvelles choses. Sur « Wolf Eats Wolf », il est dans une configuration purement expérimentale avec son groove afrobeat et sa musique jazz. Le morceau est un fragment de The Source, son premier album en tant que chef de groupe du légendaire label de jazz, Blue Note, qui réunissait de nombreux jazzmen parisiens et le guitariste camerounais Indy Dibongue.
« Zombie »
La libération du Nigeria en 1978 est un résultat de l'engagement de Kuti sur des sujets liés à l’armée, les responsables gouvernementaux et le peuple. Le rythme vif d'Allen est le squelette de la composition « Zombie », sublimé par les paroles de Kuti qui dénoncent la superficialité intellectuelle des dictatures militaires qui sévissent non seulement au Nigeria mais aussi sur le continent. L'oeuvre est saluée par le peuple, mais rend furieux le gouvernement qui multiplie alors les attaques contre Kuti et sa famille. Sa résidence familiale, la République de Kalakuta, est perquisitionnée par des militaires qui violent plusieurs femmes et jettent sa mère âgée par une fenêtre du premier étage ; elle subira des blessures graves qui causeront sa mort quelques mois plus tard.
« Rocket Juice and the Moon »
Cinq ans après la sortie de Good, the Bad & the Queen, Albarn renoue avec Allen et recrute le bassiste de Red Hot Chili Peppers, Flea, pour sortir Rocket Juice and the Moon. La collaboration aboutit à un agréable album afrobeat, enrichi par une basse et des mélodies de guitare / synthé artsy. Albarn fait également appel à une poignée de rappeurs et chanteurs africains, dont quelques-uns du programme d'échange Africa Express, notamment les ghanéens M.anifest et M3nsa, ainsi que la malienne Fatoumata Diawara.
« Water No Get Enemy »
C'est une des nombreuses chansons qui prouvent bien que Kuti a été un des courageux acteurs de la libération de son pays. Allen y propose un jeu curieux sur sa grosse caisse et sa caisse claire, une combinaison rarement entendue. La chanson, sortie en 1975, a été inspirée d’une aventure de Kuti avec la police, qui aurait dissimulé de la drogue dans les vêtements du musicien pour l’incriminer.
« Tomorrow Comes The Harvest »
Le titre figure sur un projet d'album entre Allen et le pionnier de la musique techno, Jeff Mills, en 2018. Allen se dissipe bien en deça de la sous-basse déformante de Mills, pour produire une alchimie musicale unique. Le batteur nigérian parvient à swinguer parfaitement sur l'oeuvre. Avant cette sortie, les deux artistes avaient déjà joué ensemble sur une improvisation live en 2016. Leur album est sorti en deux versions, une version européenne avec quatre pistes et une version japonaise élargie, qui comprend une piste supplémentaire et quelques modifications alternatives.
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