Journée internationale de la femme 2021 : les chanteuses et activistes africaines à l'honneur
La contribution des femmes au développement de l'industrie musicale africaine ne saurait être sous-estimée. Bien que sous-représentées et souvent marginalisées, elles sont à l'origine de certains des plus grands succès du continent à travers le monde (des productions audiovisuelles de haute qualité aux récompenses de prestige comme les Grammy Awards). Leur leadership et leurs combats pour des causes nobles et pertinentes, font d'elles de véritables modèles pour nos sociétés.
Texte de Gabriel Myers Hansen, traduit par Jean de Dieu Boukanga.
Selon l’Organisation des Nations Unies (ONU) malgré la rudesse des défis quotidiens, les femmes, en particulier la jeune génération, mènent des mouvements diversifiés et inclusifs pour le changement social, notamment en prenant position contre le changement climatique, en luttant pour une économie verte et en faisant pression pour les droits des femmes.
Pendant plus d’un siècle, la Journée internationale de la femme, célébrée le 8 mars, a servi de point de ralliement pour reconnaître et célébrer les réalisations des femmes. En outre, la journée vise à attirer l’attention sur l'égalité des genres, à faire pression pour une plus grande parité entre les sexes et à collecter des fonds pour les associations caritatives axées sur les femmes. Le thème des Nations Unies pour la Journée internationale de la femme cette année est : « Les femmes au leadership : aller vers un avenir plus égal, dans un monde touché par la Covid-19.»
« Alors que les pays et les communautés commencent à se remettre lentement de la pandémie dévastatrice, nous avons la chance de mettre enfin un terme à l'exclusion et à la marginalisation des femmes et des filles », a déclaré Achim Steiner, administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).
Steiner a appelé à l'effondrement des « barrières historiques, culturelles et socio-économiques profondément enracinées, qui empêchent les femmes de prendre leur place à la table des décisions, afin de s'assurer que les ressources et le pouvoir sont répartis plus équitablement ».
Il a ajouté : « un leadership et une représentation plus inclusifs conduisent à des démocraties plus fortes, à une meilleure gouvernance et à des sociétés plus pacifiques. »
En commémoration de cette journée spéciale, Music In Africa vous propose une playlist mettant en avant des artistes féminines connues pour leurs efforts d'activisme en Afrique.
Angélique Kidjo
Voix puissante dans la musique et en dehors, la chanteuse béninoise, quadruple Grammy, est une militante de longue date qui a à son actif, une longue liste de plaidoyers pour la cause des femmes et la valorisations des cultures africaines.
Elle a également enregistré plusieurs chansons pour des campagnes de l'UNICEF, notamment « Give the Gift of Life » en 2009, pour l'éradication du tétanos, et la chanson « Leila » en 2010, dans la compilation Raise Hope for Congo de Enough Project et Downtown Records, axée sur la protection et l'autonomisation des femmes congolaises. Kidjo est également ambassadrice de bonne volonté de l’UNICEF depuis 2002 et elle est une championne en Afrique, de la défense des droits des femmes et des droits de l’homme en général.
Elle est aussi co-fondatrice de la Fondation Batonga, qui a pour vision de faciliter l'autonomisation et l'éducation des adolescentes en Afrique subsaharienne depuis 2007.
Barbara Kanam
Dans son pays d'origine, la République Démocratique du Cong (RDC), ainsi que dans d'autres pays d'Afrique comme le Mali, le Burkina Faso et au-delà, Barbara Kanam est un symbole de solidarité et une voix pour le changement social.
À travers sa Fondation Kanam, l'auteure-compositrice-interprète, productrice, actrice et politicienne, a mené des actions de collecte de fonds et de sensibilisation autour d'Ebola, du cancer chez les enfants ou du soutien aux jeunes filles victimes de viols lors des conflits. « La musique, pour moi, est une façon d'être la voix des gens.
C'est l'engagement d'être proche des personnes, la chance de parler au monde », a-t-elle déclaré à CNN en 2018, ajoutant que sa vie et sa carrière devraient servir d'inspiration aux jeunes femmes du continent pour leur permettre de découvrir « l'espoir et la dignité, quand on sait qu'il est difficile pour de nombreuses femmes de se lever et de regarder loin ».
Oumou Sangaré
Le combat pour les droits des femmes de la musicienne malienne Oumou Sangaré, lauréate d'un Grammy Award, remonte aux années 1980. Sa carrière musicale, qui s’étend sur plus de 30 ans, lui a permis de beaucoup écrire au sujet de l'amour et du mariage, pour revendiquer à chaque fois, le respect de la liberté de choix des femmes. Elle plaide aussi fermement contre le mariage des enfants et la polygamie.
La diva du Wassoulou, comme on l’appelle, est membre du célèbre groupe féminin Les Amazones d’Afrique et elle initie régulièrement des collectes de fonds pour les plus démunis et les orphelins. Dans une interview accordée au Financial Times en 2018, Sangaré a déclaré: « Je suis très impliquée socialement dans les problèmes de mon pays.
Les politiciens devraient écouter ce que nous, les artistes, avons à dire, car nous sommes la voix du peuple. S'il y a quelque chose que je peux faire pour mon peuple, pour l'Afrique, pour l'humanité, je le ferai à travers ma musique ». Interrogée sur ce qui la motive, elle a répondu: « Le sentiment d'avoir encore beaucoup de choses à faire. Il y a tant à faire pour aider au développement de mon pays.»
Yemi Alade
Pour la chanteuse nigériane d'afropop Yemi Alade, la lutte pour l'autonomisation des femmes passe par les thèmes qu'elle choisit pour ses créations. Mais en plus de cela, elle s'associe fréquemment à des organisations caritatives, dont le PNUD, pour des campagnes visant à l'amélioration de la condition féminine.
En septembre 2020, elle a d'ailleurs rejoint l'organisation en tant qu'ambassadrice de bonne volonté. Son hit « Johnny » a d'ailleurs été utilisé pour le lancement de l’initiative d’action climatique « Mission 1.5 » du PNUD.
Yemi Alade a également rejoint un contingent international d'influenceurs qui tentent d'apporter des solutions à la crise causée par la Covid-19.
Wiyaala
Surnommée la « Lionne d'Afrique », Wiyaala, originaire de Funsi dans la région de l'Upper West au Ghana, a constamment prêté sa voix à des campagnes de l'UNICEF Ghana et du ministère ghanéen du genre, des enfants et de la protection sociale, pour la promotion de la santé et de l'assainissement, et la lutte contre le mariage et la pauvreté des enfants, ainsi que la violence familiale.
En août 2020, Wiyaala a été nommée membre du jury du Concours de la chanson contre le travail des enfants, une initiative menée par l'Union européenne et le programme d'emploi et de protection sociale du Ghana.
Dans sa musique, les exemples de son engagement en faveur de l'autonomisation des femmes abondent. Sa chanson « Tinambayai » (2014), écrite dans sa langue natale le sisaala, est une protestation contre l’exploitation des femmes en Afrique.
Raja Meziane
La carrière de Raja Meziane est l'exemple typique de ce que l’immense pouvoir d’une jeune artiste peut créer. À Prague, en République tchèque, où elle est en exil, la rappeuse, avocate et militante algérienne a refusé d'être réduite au silence.
Considérée comme une muse des manifestations antigouvernementales et la « visage de la révolution », sa musique parle de l’inégalité, de l’injustice sociale et de la corruption qui règnent dans son pays, l'Algérie.
En 2019, son activisme lui a valu une place sur la liste de la BBC des 100 femmes les plus influentes.
Yvonne Chaka Chaka
Pendant de nombreuses années, la chanteuse sud-africaine Yvonne Chaka Chaka a été une voix de premier plan dans la lutte contre le VIH / sida, la tuberculose et le paludisme. En outre, elle a agi en tant que défenseure mondiale des droits des femmes et des enfants.
En 2012, à l'occasion de la réception d'un doctorat honorifique de l'Université du KwaZulu-Natal, elle a déclaré : « Nous devons poursuivre le dialogue pour créer un changement culturel en transformant des sujets tabous tels que l'autonomisation des femmes, en sujets de discussion acceptables.
Il faut commencer à examiner comment les attitudes liées au genre affectent nos environnements socio-économiques et politiques, car il ne suffit pas simplement d'entendre les problèmes du genre dans l'abstrait. Nous devons plutôt les voir en face à face et cesser de faire des suppositions sur les femmes.»
L’année dernière, la « Princesse d’Afrique » a lancé WOMan Radio, une chaîne en ligne dirigée par des femmes, pour faire progresser sa vision de l’autonomisation des femmes dans l’espace médiatique. La plate-forme promeut des mesures progressistes favorisant l’équilibre entre les sexes.
Lira
En dehors de ses impressionnantes aptitudes vocales, la chanteuse sud-africaine Lira fait partie des artistes les plus influents du continent, qui exploitent leur célébrité pour des causes sociales.
Sur plusieurs de ses albums, dont les chansons les plus prisées ont été écrites à la gloire de Nelson Mandela et de Barack Obama, elle propose un modèle de positivité qu'elle considère comme la clef d'un réel changement à travers le monde, en particulier pour les femmes et les filles.
En 2019, elle est devenue la première femme africaine à faire fabriquer une poupée Barbie à son image, dans le cadre de la campagne mondiale de Mattel, visant à donner aux filles des modèles diversifiés tout en célébrant les femmes inspirantes. « J'ai été tellement émancipée grâce à mon voyage », a déclaré Lira à Deutsche Welle. « Je suis vraiment autonome dans ma musique et je veux vraiment cela pour les autres femmes. Mon objectif est de leur partager ce que j’ai appris durant mon parcours.»
Edith WeUtonga
La musicienne afro-jazz et traditionnelle du Zimbabwe Edith WeUtonga est une vraie perle pour son pays et pour l'Afrique. En utilisant quatre langues pour ses créations, cette bassiste et compositrice accomplie s'est distinguée comme une voix incontournable sur le continent et elle aborde des thèmes pertinents touchant la société.
Au cours de sa carrière, elle a dirigé diverses campagnes, notamment la lutte contre le paludisme en Afrique, ainsi que la promotion de l'éducation des jeunes artistes féminines, afin qu'elles puissent prospérer dans l'industrie. « Pour les musiciennes émergentes, il est important d’avoir des connaissances, car si vous en avez, vous serez plus attrayante et aurez le pouvoir de négocier ce que vous voulez en tant que musicienne. L'éducation est la seule voie à suivre », a-t-elle déclaré en 2019.
Selmor Mtukudzi
L'actrice et chanteuse zimbabwéenne d'afropop Selmor Mtukudzi estime que l'autonomisation des femmes est la clé du bien-être d'une nation.
Au cours de sa carrière, elle a fait preuve d'un activisme remarquable, notamment dans les campagnes Strong Girl et Poverty Is Sexist. En 2015, Mtukudzi, qui est la fille de feu Oliver Mtukudzi, a rejoint huit musiciens à travers l'Afrique sur la chanson « Strong Girl », qui appelle les femmes et les filles à jouer un rôle central dans la lutte contre la pauvreté.
En 2017, elle s’est adressée au parlement canadien au sujet de l’importance de l’éducation des filles. Mtukudzi est également le fondatrice de Vabvana Trust, une organisation visant à élever et à amplifier la voix des filles et des femmes.
Muthoni Drummer Queen
Cette rappeuse et entrepreneuse culturelle kényane est non seulement réputée pour son approche progressive du hip hop alternatif et de la musique électronique, mais aussi pour donner la priorité au féminisme dans son art.
Son troisième album à succès SHE, est une célébration du dynamisme, de la force, de la beauté et de la résilience de la femme africaine. « Je crois que les femmes sont des êtres exceptionnels, avec le pouvoir de prendre des décisions sur leur propre vie », a-t-elle déclaré. « Mon image est celle d'une patronne et d'une reine, parce que je veux créer un autre idéal pour les femmes, sur une scène hip-hop dominée par les hommes.»
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