Les opportunités musicales au Togo
La scène musicale togolaise foisonne de musiciens en tout genre, aux talents divers, et aux carrières tout autant plus diverses. La musique est, sans abus de langage, le parent pauvre de la culture togolaise. En effet, les initiatives de soutien aux musiciens se comptent sur les doigts. Paradoxalement, les chaînes de télés et de radios locales nous font découvrir chaque jour de nouveaux artistes. Si certains artistes font plus long feu que d’autres, c’est non seulement grâce à leur talents, mais aussi et surtout aux opportunités rencontrées durant leur carrière. Comment les artistes togolais gagnent-ils leur vie ?
Commençons d’abord par les acteurs étatiques, vu qu’il existe un ministère de la Culture. Le Fond d’Aide à la Culture. Lancée en 2013, cette initiative du gouvernement a pour objectif d’aider les artistes dans la réalisation de leurs projets, afin de les rendre compétitifs sur le marché local et international. Le fond couvre 5 domaines, dont la musique. Certains artistes en bénéficient, juste pour se lancer. Puis après, la réalité est toute autre.
Les musiciens, une fois leurs œuvres créées, se voient protégés par le Bureau Togolais des Droits d’Auteurs (Butodra), qui est un établissement public à caractère professionnel créé par la loi N° 91-92 du 10 juin 1991. Sa mission : défendre les droits et gérer les intérêts des auteurs. Entendre par « gérer les intérêts des auteurs », le versement d’une somme conséquente au nombre de fois que les chansons d’un artiste sont jouées par les médias (télé comme radio), dans les bars et autres endroits.
Cette somme, qui reste encore un montant dérisoire, est difficilement versée aux bénéficiaires. En effet, le Butodra n’a pas les moyens de procéder à des vérifications, et rares sont les artistes connaissant l’existence de cette disposition de la loi.
D’un autre côté, les initiatives privées foisonnent. Et heureusement. Elles partent de la formation, à la promotion des artistes, en passant par leur production.
La belle-mélodie est l’une des écoles de musique les plus en vue de la capitale. Créée en 1992, elle offre en effet des formations en Instruments de musique, et en voix. Pour cette école, un artiste, doit connaitre les bases de la musique, et doit également être capable de manier convenablement au moins un instrument, en studio. Cette école offre des bourses de perfectionnement aux divers instruments de musique (Piano, guitare, trompette, flute, accordéon…)
Pour Clémentine Ayefouni, soliste d’opéra, ancienne pensionnaire de l’école de musique la Belle Mélodie, « on fait d’abord de la musique parce qu’on a ce don, et parce qu’on aime la faire. Après, oui il est nécessaire de passer par une école, ou un coach vocal, pour peaufiner son art. Le talent s’impose de lui-même, et on finit par jouir de son travail. »
A la question de savoir si elle vit de son art, l’artiste répond « j’ai un métier qui m’assure un salaire mensuel, et c’est de cela que je vis, principalement. Je suis chanteuse d’opéra, un genre méconnu du grand public togolais. Cependant, les tickets pour mes divers concerts s’arrachent comme de petits pains. Si ma passion est une source de revenus, c’est tant mieux ».
King Mensah, le roi de la musique togolaise, a initié un concours de musique lui permettant de repérer des jeunes talents, les coacher et leur faire bénéficier de sa maison de production. Le projet initié il y a trois années de cela, est actuellement suspendu.
Le projet le plus en vue, dédié à la promotion des jeunes musiciens talentueux, reste le concours 228 T Factor. Porté par la maison All That Production, ce concours télé donne sa chance à ceux qui ont les aptitudes pour être artistes mais que ne le sont pas encore. Les lauréats, à l’issue du concours, bénéficient d’un accompagnement, qui va jusqu’à la sortie d’un album, dont la promotion est assurée par la maison de production.
Ce concours a le mérite de faire ses castings sur toute l’étendue du territoire, notamment dans les grandes villes du pays. Il bénéficie du soutien de plusieurs partenaires, dont la Télévision nationale et le réseau de télécommunication Togocel.
Au rang d’initiatives privées, il y a enfin, des concours de chants organisés çà et là par des groupes hôteliers. L'hôtel Balkan a par exemple initié l’année passée, le concours « Balkan Open Mic ». Le principe diffère un peu du karaoké, et, permet aux concurrents de faire des prestations primées.
L’établissement Premium Esplanade n’a pas hésité à lui emboîter le pas, avec un concept plutôt orienté vers la déclamation des chants togolais. Ces initiatives permettent certainement d’aider quelques talents qui passeraient par-là, mais elles restent essentiellement publicitaires et mercantiles.
Ce qui est plus lucratif pour les artistes togolais, ce sont les concerts et autres événements organisés par des grands groupes de communication événementielle. Ils offrent en effet un plus large public aux artistes, sans oublier les cachets derrière chaque prestation. Malheureusement ces événements ne sont pas fréquents au Togo.
Les compagnies de téléphonies Moov et Togocel demeurent à ce jour, les plus grands organisateurs d’événements musicaux. Se déroulant durant les grandes vacances scolaires, de préférence, ces deux compagnies offrent des scènes sur lesquelles se succèdent artistes locaux et internationaux.
La scène musicale togolaise n’est tout simplement pas encore assez mature, pour permettre à ses acteurs d’en tirer subsistance. Les maisons de productions foisonnent, mais elles sont minées par l’amateurisme et le manque de vision. Un autre frein est que le public togolais ne constitue pas un marché à fort potentiel. Si les tickets de quelques concerts sont vite vendus, on ne peut en dire autant pour les albums.
Publier des images sur les réseaux sociaux, à grand renfort de hashtags divers ne cache pas la triste et dure réalité de ces artistes encore réduit à se balader de bars en bars avec leur album, pour les proposer directement aux consommateurs.
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