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L’apport des mass-médias dans le développement de la musique congolaise .De la colonie à la postcolonie
L’évolution de la musique congolaise est intimement liée à celle des médias écrits et audiovisuels en République Démocratique du Congo. Par médias audiovisuels, je sous-entends ici la Radio et la télévision. Il est donc question dans cet article de décrire brièvement le cheminement concomitant de ces médias à l’aune des exploits réalisés dans le domaine de la musique par les créateurs congolais dans leur déploiement diachronique. Pour ainsi dire, il s’agit d’envisager la participation des principaux acteurs de cette musique saisis à partir de leur capacité consciente et constante à produire leur art dans leur rapport au temps et à leur espace culturel. Ce, depuis les premiers enregistrements de la musique congolaise, au stade de la proto-rumba (années 40) jusqu’à la phase de son affranchissement des esthétiques d’inspiration afro-caribéenne (années 60). Une telle démarche pose ainsi le problème de la relation entre l’espace créatif et les outils de médiatisation qui ont permis et accompagné la diffusion et la promotion, à grande échelle, de la musique congolaise.
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Bref rappel de l’émergence des premiers médias en RDC
En République Démocratique du Congo, la presse écrite demeure la fille aînée des mass médias. Pour s’en convaincre, il suffit de relire le dernier ouvrage en date de notre confrère Jean-Chrétien Ekambo, intitulé Histoire du Congo RDC dans la Presse : Des origines à l’indépendance, édité au cours de cette année par L’Harmattan. Ce livre, rédigé par un excellent didacticien de l‘information et de la communication, a le mérite de retracer avec une parfaite cohérence la trajectoire empruntée par les premiers journalistes (en majorité étrangers) dans leur relation des faits dans ce qui était aux origines (avant 1885) l’Association Internationale du Congo, selon la sémantique de l’époque.
Dans la suite logique de cet ouvrage, auquel il a consacré une belle recension, Banza Mukalay Nsungu, quant à lui, tisse la trame de l’histoire de la presse congolaise, à partir du fondement de ce que l’histoire a nommé d’abord AIC (Association Internationale du Congo), devenu chemin faisant EIC (Etat Indépendant du Congo). Un Etat forgé de toutes pièces dans la dynamique de la Conférence générale de Berlin, de 1884-1885 jusqu’à l’indépendance, en 1960. On y retrouve la trace, ô combien palpitante, de l’activité journaliste dès l’entrée en scène de l’explorateur anglo-américain Henry Morton Stanley, alors au service de The Daily Telegraph de Edward Levy-Lawson et du Journal New York Herald de Sir James Gordon Bennet. Les premiers journalistes qu’accueille le Congo sont tous des européens de passage sur le territoire d’un pays encore dans sa phase de « découverte », sinon d’ouverture vers l’extérieur. On retrouve un abondant témoignage dans le Journal des voyages de Stanley évoquant (vers 1875)son voyage à travers l’Afrique de l’est vers l’ouest, au cours duquel il dut se battre contre les villageois au moyen des armes à feu, appuyé en cela par son armée de Zanzibarites.
« A mon sens, indiqueBanzaMukalayNsungu, il est avéré que l’histoire coloniale, dès 1885, s’est écrite à quatre mains : la main du politique (l’Administration coloniale) ; celle de l’Armée coloniale ; celle de l’homme en soutane (l’Eglise) ; et, en filigrane, celle des scientifiques (philanthropes et géographes, membres de l’Association Internationale du Congo).Bien avant la science géographique, c’est la presse qui, comme on le voit, semble avoir pris le devant de la scène dans la course effrénée vers la découverte de cette terra incognita du temps des découvertes et le mystère enveloppant la source de ses cours d’eau.»
Un Etat est donc né à la fois d’une sorte de fascination mystique et d’une curiosité vouée à une terre jusque-là célébrée localement par ses propres fils par la voie de l’oralité. Genre narratif plus volatile et essentiellement « fixée » par la mémoire. Vu ainsi, on peut dire que les premiers journalistes africains sont donc, de ce point de vue, les griots de nos villages et, parfois, certains notables de la « cour royale » commis à cette tâche. Cette catégorie de médiateurs appartient à une période difficile à dater. Une certitude cependant : chaque communauté congolaise en a connu sous quelque forme que ce soit.
Loin de nous l’idée d’inscrire le présent « papier » dans une topique dualiste opposant une certaine « civilisation de l’oralité »etune « civilisation de l’écrit » ainsi que tous les préjugés qu’elles recèlent l’une par rapport à l’autre, il nous incombe tout juste de montrer qu’au-delà de la mémoire des griots de nos sociétés précoloniales, le Congo a commencé à consigné certains pans de sa culture populaire sur des supports autre que par le biais de l’auraliture (du latin aura : souffle). Contes, épopées, comptines, chants et musiques fonctionnels, etc. sont, de longue date en Afrique portés par la seule culture orale.
C’est que, au contact des premiers européens (début XVe siècle), la nature de l’information consignée par les premiers journalistes du temps des explorateurs est de nature scientifique, ethnologique, voire politique.
Au temps de Léopold II
Déjà sous le régime léopoldien (fin XIXe siècle), l’on sait combien un certain Edmund Dene Morel, agent de la compagnie de navigation Elder Dempster de Liverpool puis journaliste d’investigation au West African Mail, après avoir récolté des témoignages sur les atrocités du roi Léopold II autour de la récolte de la sève de caoutchouc a gratifié son lectorat européen des témoignages poignants sur les pratiques inhumaines ayant cours en ce temps-làdans la région de l’Equateur sur les populations congolaises.
C’est la plume au vitriol du journaliste anglais qui finit, même, par déboulonner de son piédestal « d’humaniste exemplaire » le monarque propriétaire du Congo, Léopold II. Autant que s’indigna, au sujet des mêmes faits, un autre journaliste noir américain, Georges Washington William, à travers sa fameuse « Lettre ouverte au roi Léopold II… » largement diffusée dans le monde anglo-saxon d’alors en forme d’acte d’accusation dénonçant la cruauté excessive du roi envers les Congolais, parfois même pour des délits insignifiants.
A l’époque, nul reportage intéressant sur la culture des indigènes. Sinon quelques traits forcés et anecdotiques sur un folklore sympathique décrit rapidement sous un regard condescendant et extraverti.
1908.Après avoir siphonné toute la sève desarbres à caoutchouc de la forêt congolaise, le roi Léopold II a fait faillite. Il est contraint de céder son Etat personnel, l’immense Congo, à l’Etat belge. Il meurten 1910couvert d’opprobre à la suite des révélations de la presse européenne sur les atrocités et le sang versé sur la liane congolaise (titre d’un ouvrage célèbre deDaniel Vangroenweghe, Du sang sur les lianes, Bruxelles, Didier Hatier, 1986), sous la tutelle du roi.
Entre l’idéologie coloniale et le réveil des opprimés
Dans la foulée, dès 1921, surgit des arpents d’un petit village du Bas Congo nommé Nkamba, un « illuminé » et « prophète maudis » supposé, Simon Kimbangu. La geste de cet ancien catéchiste protestant et ses idées « pernicieuses » et « subversives »offrent de la matière à la presse coloniale encore entre les mains des Blancs. La prétendue félonie de « l’enfant terrible » de Nkamba est dissertée à l’envi dansL’Avenir colonial et Le Progrès colonial. Qui, jusqu’à la caricature, y dénoncent ses « dérives »et ses infidélités à la religion mère.
Quand apparaissentCourrier d’Afrique (fondé en 1930), puisLa Croix du Congo (lancé en 1933), organes de presse fabriqués par la Sodimca (Société d’imprimerie et de cartonnage),cette fois l’objectif de la colonisation semble être celui d’influer positivement sur la vie des laïcs congolais. C’est en fait« le côté humaniste des Supérieurs Ecclésiastes qui est ici mis en avant dans une société congolaise en proie à toutes sortes d’enjeux : économique, politique, social… Les Ecclésiastes sont préoccupés par la persistance de certaines formes insupportables d’iniquités au sein de la société coloniale, quoiqu’étant elle-même écartelée entre les ambitions de la christianisation et de la capitalisation des bénéfices économiques. Et dire qu’il leur faut aussi témoigner de l’unicité et de la convergence des idéaux d’une colonisation qui commence à être mal ressentie par les autochtones », soutient BanzaMukalay.
Tant dans les écrits des explorateurs, des missionnaires que ceux des colons, nombre d’aspects touchants aux cultures indigènes étaient quelque peu trivialisés. Il reste que c’est le développement de la ville et ses valeurs policées, tendant à s’affranchir progressivement d’une ruralité sans perspective, qui va éviter aux musiques urbaines naissantes de végéter dans une sorte d’hypertrophie de l’imaginaire.
Quand vint la Radio
Appelé à pallier à l’illettrisme ambiant et à la sous-information, l’implantation de Radio Léo, crééepar des Jésuites, en 1936, installe dans les mœurs des auditeurs indigènesde nouveaux repères auditifs. Subjuguée par la nouveauté et la magie technologique qu’elle induit, Radio Léo séduit tout de suite l’indigène congolais par une programmation on ne peut élitiste. On y entend et y découvre des musiques venues d’ailleurs (valse, boléro, polka piquée, biguine). Davantage, la chansoneuropéenne et le jazz américain, genres prisés par la colonie européenne du Congo.
Radio Léo couvre dans un premier temps Léopoldville et Brazzaville.Chemin faisant, son auditoire s’élargissant au-delà des frontières congolaises, Radio Léodevient en quelques décennies, de 1930 à 1955, la référence auditive la plus importante sur l’ensemble du territoire colonial, jusqu’en 1967, date à laquelle elle cesse d’émettre. Parallèlement au développementtechnologique et idéologique induit par cette radio, une industrie musicale est née de la conjonction de la surenchère et des joutes entre commerçants hollandais, grecs, juifs et autres belges installés dans la capitale Léopoldville, à qui on attribue l’effervescence des labels les plus significatifs de l’époque :Ngoma, Esengo, Opika, CEFA, etc.
C’est cette formidable synergie, entre la radio et l’industrie musicale naissance, qui va contribuer à l’affirmation de l’une des musiques les plus emblématiques du continent noir : la rumba congolaise. Née du mélange des rythmes afro-caribéens et des esthétiques du terroir congolais, la rumba s’offre au public congolais comme une oblation. Si la radio n’en diffuse pas à la pelle, c’est que les disques en « ardoise », les fameux 78t(le support de l’époque), n’en offre encore qu’en quantité limitée. Mais la saveur de cette musique, elle, commence à prendre. De cette même scène agonistique de l’heure émergent les premières vedettes de la chanson congolaise (Avambole, TekeleMonkango, Baudouin Mavula, Bosele, BondoYambaYamba, Wendo, Antoine Kasongo, Camille Feruzi, etc.).
Dès 1936, Radio Congolia, un média privé, dont l’activité s’articule entre l’information et la distraction est l’organe qui, le soir venu, diffuse de la rumba et des rythmes afro-caribéens (biguine, calypso, chachacha, etc.). C’est du reste Radio Congolia qui sert de premier studio d’enregistrement à la première fournée des pionniers de la musique congolaise émergents, bien avant les éditions Ngoma et autres.
Reste que c’est surtoutRadio Léo, sa devancière et concurrente, quidispose d’un programme des plus éclectiques qui offre au passage l’occasion aux populations indigènes d’écouter des programmes en langues vernaculaires.
Entre-temps, la métropole est prise de convulsions sociales. La guerre bat son plein. Hitler et sa horde de Nazis sèment la terreur partout. Débarrasser l’Europe des races impures pour n’y implanter que la seule race aryenne est bien l’ambition du Führer. Et ce sont justement les aléas de la guerre qui vont pousser la métropole belge, engagée aux côtés des alliés européens et américains, à se servir de la radio pour organiser la « résistance radiophonique » contre les Nazis en transférant, en 1942, la Radio Nationale Belge de Bruxelles à Léopoldville. Ce qui, pour le coup, pendant un temps, fit de Léopoldville, la capitale de la Belgique indépendante.
A la fin de la Seconde Guerre mondiale, la Radio Nationale Belge se (re)nationalise en portant le nom de La Voix de la Concorde. Radio métropolitaine qui diffuse des programmes destinés essentiellement à rehausser le moral des Belges disséminés sur tout le territoire d’outre-mer (au Congo) de manière à flatter le destin collectif de la mère-patrie dans le sens d’une espérance commune. C’est cette Voix de la Concorde qui permet de dévoiler au grand public une des plus belles voix de la musique congolaise : Kabasele Joseph alias Kallé Jeef. Que le public découvre ensuite via les éditions Opika, puis Esengo. Kallé y fait étalage non seulement deson charisme, mais ausside ses grandes qualités de chef d’orchestre à la tête d’un des ensembles les plus puissants de l’époque, l’African Jazz. Orchestre moderne, composé des virtuoses à chaque poste (Nico, Déchaud, Mwena, Isaac Musekiwa, Maproco, guitares et sax) qui utilise déjà les instruments les plus sophistiqués empruntés dans la tradition musicale européo-afro-cubaine : les claves, les tumbadoras, les timbales, les guitares électriques, les maracas, les trompettes et les saxophones. C’est à ce titre qu’il est intronisé « Père de la musique congolaise moderne ».
Lorsqu’à partir de 1954 les antennes régionales de Radio Congo Belge s’installent à Elisabethville, puis à Stanleyville et Constermansville, la musique congolaise a atteint son meilleur niveau d’exigence.S’ensuit une double incidence : d’une part, la Radio se sert de la musique comme support d’ameublement et, autre part, l’industrie de la musique (à travers elle les chanteurs et musiciens sous sa tutelle) tirent le meilleur parti de leur passage sur antenne comme opportunité de diffusion et de promotion à grand échelle de leurs œuvres.
La radio devient ainsi, à côté de la presse écrite, un puissant instrument d’évasion, de popularisation de la musique congolaise, de connaissance et d’information autant pour les indigènes que pour les étrangers habitant le Congo belge.
Pendant ce temps une floraison de titres de journaux comme La Croix du Congo, La Voix du Congolais et L’Echos postal où une jeune lettré nommé Patrice Emery Lumumba écrit des articles croustillants, autant qu’un jeune secrétaire-comptable-dactylo, Joseph-Désiré Mobutu, sorti de l’école des pères de Scheut et reçu par la suite comme sergent dans la Force publique, attirera sur lui progressivement l’attention de ses concitoyens en rédigeant des textes dans les Actualités africaines. Journaux où, à côté de la chronique politique, quelques colonnes seront consacrées aux potins de la cité, mettant parfois en exergue les activités culturelles de la ville.
Quant à la Voix du Congolais, journal destiné aux « évolués » où la « plume sacrée » d’Antoine-Roger Bolamba, rédacteur en chef, est un vrai sémaphore, toutes les rubriques s’y côtoient. Si la politique a la primeur sur le reste, la littérature et la chronique culturelle donne la voix aux meilleurs animateurs socio-culturels du milieu « indigène ».
La Voix du Congolais porte, à vrai dire, les promesses d’une communauté de destin rêvant d’un Congo sans chaînes « cherchant les doux trésors du savoir à l’école ». Un peu à l’image de Moïse, le Patriarche biblique des Hébreux, La Voix du Congolais qui avait tant rêvé d’un Congo émancipé dut, pourtant, mettre les clés sous le paillasson en 1959, juste devant la porte de la « Terre promise ». Cela, comme l’a écrit Banza Mukalay Nsungu, sans avoir eu à goûter aux délices de l’Indépendance, dont les premiers pas capricants sur l’air entraînant de l’emblématique Indépendance chacha de Kallé Jeff et l’African Jazz ne furent esquissés que bien plus tard le 30 juin 1960, sous les « hourras » et « vivas » d’un peuple gavés de bonheur. Le temps que dura la fête de l’indépendance.
Mais dans les dépêches de l’ACP (Agence Congolaise de Presse) que l’on trouve des articles les plus croustillant, puisque rédigé par un journaliste de talent, Jean-Jacques Kandé ; articles collés le plus souvent à l’actualité de la musique congolaise, entre 1956 et 1960. On peut y lire avec délectation autant les interviews d’artistes de renom de la musique de la période coloniale (Kallé, Dewayon, Franco, Nino, Essous, Rochereau, Nico, Lucie Eyenga, etc.), des chroniques et articles critiques voués aux ensembles les plus en vue (OK Jazz, African Jazz, Beguen Band, etc.),tout comme les activités des sociétés récréatives et d’éléganceou des mutuelles kinoises d’entraide dont il était lui-même membre de l’une d’entre elles.
Juin 1960 : en traversant la dernière ligne d’arrivée
30 juin 1960. Au doux soleil des tropiques un nouveau drapeau, tout bleu frappé d’une étoile jaune, flotte dans le ciel congolais. Les liens avec la colonisation sont rompus. Vive l’indépendance.
La postcolonie est la période qui va sceller une parfaite union entre les médias et la musique congolaise. Car l’espace promotionnel que lui offre la presse en pleine explosion dépasse tout entendement. Dans un premier temps, plus de 350 titres de journaux commencent à paraître régulièrement au Congo indépendant. Le plus célèbre d’entre ces titres est Le Courrier d’Afrique de Gabriel Makosso, qui s’imposa pendant 40 ans avant de disparaître en 1970. Suivi, à Kinshasa, de Courrier d’Afrique, Afrique Chrétienne, Présence Congolaise, L’Etoile, Le progrès, La Tribune, Salongo, Elima, Zaïre, Actualités Africaines, Masano, Congo-Afrique, Le Phare, Le Potentiel, Umoja, La Référence Plus, Palmarès, Le Soft…; à Bukavu de La presse africaine ; à Kisangani, L’Echo de Stan ;Lubumbashi, l’Essor du Katanga, La Dépêche, Mwanga, Taifa, etc.
En plus de rubriques régulières consacrée à la musique dans la grande partie de ces titres, sous leur périodicité quotidienne ou hebdomadaire, des tirages spéciaux comme Elima Dimanche ou Salongo Selection devenues à terme de vraies « institutions », à côtés des revues spécialisées en musique comme Jeunes pour Jeunes ou Likembe, ont permis aux musiciens et chanteurs de mieux vendre leur image auprès du public pendant de nombreuses années. On pourrait même dire que ces magazines spécialisés ont le mérite d’avoir accompagné l’âge d’or de la musique congolaise (le grand succès de Negro Succès, Festival des Maquisards, Grands Maquisards, Sosoliso du Trio Madjesi, le passage de Rochereau à l’Olympia de Paris, etc.).
Côté médias audiovisuels, la Radio Nationale Congolaise s’étant doté d’un puissant émetteur de 600Kw, dénommé le Grand Tam-tam d’Afrique, devint à partir des années 70 le centre de rayonnement de la musique congolaise à travers le monde. Non seulement sa programmation est animée par des chevronnés du micro, Alphonse Mavungu, Pierre et Bruno Kalala, Luc Michel, Ignace Mabeka, Simon Lungela, Kayumbi Beya, Tambwe Mushapata, Mateta Kanda, Nzazi Mabidi, Siula Masiula, Pauline Kabangu, Pauline Lisanga, Mama Angebi, Mama Kanzaku, etc., sa grille laisse une part belle à la rumba congolaise. Qu’elle impose dans les quatre coins du monde comme la marque de fabrique du Congo.
Relayées dans les 11 provinces du pays, la RTNC est restée longtemps la Voix du Congo, puis du Zaïre, puis encore de la RD Congo. Une voix à laquelle s’ajouta dès 1966 une image, à l’occasion de l’implantation de la télévision nationale à Kinshasa. Forte de ses capacités d’attractivité, la télévision devint en quelque sorte une « salle de spectacle » mise en boîte destinée à assouvir la soif desmélomanes congolais en musique. Ses programmes spécialisés comme Bakolo Miziki, Télé-show, Kin Show, Kin-Kiesse, Température 50, Variétés Samedi Soir, Zaïre No1, Invité du Dimanche, Karibu Variétés, Hit-Parade, et bien d’autres programmes de variétés conçus et animés par des présentateurs charismatiques comme Lukunku Sampu, Simon Lungela, Kayumbi Beya, Kena Tchali, Lukezo Lwansi, Manda Tchebwa, Biyevanga Lengemi, Mbuyi Mbwebwe, Ilunga Mwana Bute, Mami Ilela, Serge Kayembe, Zacharie Bababaswe, etc. sont intimement liés à l’émergence d’une musique congolaise compétitive.
La libéralisation de l’espace médiatique, à la faveur de l’avènement de la démocratie, années 80, consacre l’ouverture tous azimuts de la télévision à la musique. Là où, sous le monopole de la chaîne étatique, le musicien n’avait droit qu’à une ou deux émissions musicales d’une heure par semaine, désormais plus ou moins une cinquantaine de nouvelles chaînes agréées par l’autorité publique offre plus d’espace, suffisamment pour prendre en charge la promotion, moyennant des espèces sonnantes, d’un grand nombre d’artistes sans qu’il soit nécessaire de passer toujours les mêmes.
Reste cependant à améliorer le contenu de la grille, qui pèche souvent par l’inexpérience et le manque de qualification du personnel d’antenne, le plus souvent recruté sur le tas. C’est un des défis majeurs qu’il va falloir relever avec le concours de toutes les institutions de formation et les organisations de régulation ou d’autorégulation les plus crédibles.
Si la musique congolaise, elle-même inspiré par le génie de ses pionniers, a su gagner en maturité et en attractivité, grâce à l’excellente synergie qu’elle a pu développer aux côtés des hommes des médias sur une longue trajectoire, il se trouve qu’elle doit maintenant faire face aux effets d’une pandémie inexorable qu’est la piraterie, sous toutes ses formes. Véritable peste des temps modernes pour nos artistes, la piraterie a réussi l’impensable : tuer le métier de producteur. Du coup, il ne reste aux créateurs qu’une solution de repli : le spectacle vivant. Pour combien de temps ?
En vrai héros, le musicien congolais a le mérite d’avoir forgé son propre destin dans les méandres d’une histoire qui ne s’est pas bâtie en ligne droite. Grâce, en grande partie, à … l’appui des médias.
Par Manda Tchebwa
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