Covid-19 - Sénégal : lettre ouverte de l'AMS au président Macky Sall
Depuis le début de la pandémie du Covid-19, l'Association des métiers de la musique au Sénégal tire la sonnette d'alarme pour sensibiliser le gouvernement à la catastrophe qui menace les professionnels de la musique dans le pays. Malgré des annonces et des promesses, aucune action concrète n'a été vraiment prise par l'État pour venir en aide aux acteurs du secteur. Inquiète de cet état de fait, l'AMS vient d'adresser une lettre ouverte au président sénégalais, Macky Sall.
Monsieur Le Président de la République,
L’Association des Métiers de la Musique du Sénégal vient vous faire part des vives inquiétudes qui saisissent l’ensemble des professionnels des arts, et particulièrement ceux du spectacle vivant. De guerre lasse, notre cri du cœur s’adresse au Protecteur des Arts, des Lettres et des artistes que vous incarnez.
Nous affirmons avec force à notre Protecteur que nous ne sommes et ne nous sentons pas protégés.
La survie du spectacle vivant n’est pas attachée à la seule visibilité de certains acteurs de premier plan qui font rêver et peuvent donner l’impression que la masse invisible vit dans l’opulence. Ils constituent le reflet de l’arbre qui cache la forêt de femmes et d’hommes aux ordres que sont les : musiciens, comédiens, danseurs, techniciens, régisseurs, managers, bagagistes, éclairagistes, tourneurs, metteurs en scène, professeurs d’art,… Dieu que cette liste est longue comme la misère que nous impose le corona virus.
Nous ne sommes pas protégés. Certes, nous sommes des créateurs, des artistes interprètes, des producteurs, des auxiliaires de la création et du spectacle, nous n’en demeurons pas moins des travailleurs qui ne bénéficient d’aucun filet de protection sociale digne de ce nom
Nous ne nous sentons pas protégés. Nous nous sentons toujours entendus, mais rarement écoutés. Parce ce que nous avons été enfin écoutés, la loi de 2008 sur le droit d’auteur et les droits voisins qui a donné naissance à la SODAV a vu le jour. Cela a pris 16 ans.
Pour tous les acteurs culturels du spectacle vivant, des propositions concrètes ont été faites à vos services compétents pour anticiper sur la mise en œuvre de la future loi sur le statut de l’artiste, à savoir : une convention collective pour les travailleurs du spectacle, une mise en place d’un guichet unique du spectacle, une protection sociale des artistes accolée à la caisse de sécurité sociale sous couvert de la mutuelle de santé MNSAC, une fiscalité adaptée à la culture et, une éducation artistique moderne pour toutes et tous et tout particulièrement à l'école. Nous avons les solutions. Elles sont entendues, mais pas écoutées. Devrions nous attendre encore 16 ans et voir nos enfants qui aspirent aux métiers des arts subir le même sort que d’illustres disparus de notre secteur ?
La pandémie a surpris plus d’un d’entre nous. Nous continuons d’être inventifs, créatifs, optimistes. Mais nous continuons à ne pas être écoutés. On nous a entendus proposer des solutions pour amortir l’impact des effets négatifs du covid-19 dans le cadre du fonds Force Covid -19, à savoir : un représentant de la culture au sein du comité national de suivi, une répartition de l’aide (sous la supervision d’un comité de veille) octroyée en trois séquences comme suit : une caisse de solidarité pour tous les acteurs, une caisse d’appui aux entreprises culturelles (dont la SODAV qui frise le dépôt de bilan), et une caisse de relance des activités culturelles mises en berne du fait de la pandémie
Monsieur le Président de la République, le mercredi 06 mai 2020, vous invitiez Monsieur le Ministre de la Culture à veiller à la répartition rapide des fonds de soutien. « Comment répartir ce qui n’est pas octroyé ? » nous est-il rétorqué. Et quand bien même cela était effectif, par mesure de transparence, la population culturelle ne devrait-elle pas connaitre le montant global de cet octroi ? Depuis deux mois, tous les acteurs culturels sont sans revenus pendant que certains travailleurs d’autres secteurs au chômage continuent de percevoir au moins 70% de leur salaire. Comprenez, Monsieur le Président de la République, que nous ne nous sentons pas écoutés.
Protecteur des Arts, des Lettres et des Artistes, protégez-nous afin que nous protégeons et préservons la Culture.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le président de la République, l’assurance de notre haute considération.
Pour le Comité Directeur
Le Président
Dakar, le 21 mai 2020
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