Burundi : la nouvelle politique culturelle se fait toujours attendre
La politique culturelle du Burundi qui date de 2007, élaborée avec l’appui de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) et de l’Organisation des Nations unies, pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), devrait après plus de dix ans être repensée et adaptée aux réalités actuelles.
En 2019, une révision de l’actuelle politique culturelle a été apportée par des experts, professeurs d’universités et techniciens du ministère en charge de la culture. Le nouveau document n’a pas encore reçu l’aval du conseil des ministres pour être promulgué.
Par ailleurs, l’organisation des états généraux de la culture est vivement attendue par les acteurs et opérateurs culturels avant l’adoption de la nouvelle politique culturelle récemment actualisée.
Nécessité de doter le pays d'une nouvelle politique culturelle
Du 24 au 29 octobre 2013 à Bujumbura, un atelier de réflexion et d’échange sur la mise en œuvre d’une politique culturelle du Burundi a été organisé par le ministère de la Culture, Africalia, l’Observatoire de politique culturelle en Afrique (OCPA) et le Collectif des producteurs pour le développement de l’audio-visuel et du cinéma au Burundi (COBRODAC) et a réuni les acteurs du secteur culturel du Burundi et des experts internationaux pour analyser le document de politique culturelle adopté par le gouvernement du Burundi en 2007 et à la fin sortir des recommandations et les observations orientant les actions à mener dans le futur.
À la fin de l'atelier, un comité a été mis en place chargée de coordonner un état des lieux du secteur de la culture qui devrait être donné au ministre de la Culture fin 2014 pour qu’à la fin soit préparé les états généraux de la culture au Burundi qui vont actualiser la politique culturelle de 2007.
D’après Simon Kururu, artiste et auteur-compositeur, ancien président du Conseil national de la communication (CNC) membre fondateur du Collectif des producteurs pour le développement de l’audiovisuel et du cinéma au Burundi (COPRODAC).
Le COPRODAC a essayé de mettre en place un plan stratégique pour le développement du cinéma au Burundi et il a fallu réfléchir sur le futur de l’audio-visuel, le gouvernement avait déjà adopté une politique de l’audio-visuel bien claire qui disait que 60 % des diffusions au Burundi devraient être locales, c'est-à-dire des chansons, des films, des séries, des clips diffusés à la télévision et à la radio doivent être des œuvres nationales en considérant que les diffuseurs doivent payer les droits d’auteurs.
L’atelier organisé par le COPRODAC en 2013 a permis d’échanger avec les experts, partenaires et parties prenantes tels que les artistes, compositeurs, interprètes, ministère de la Culture, ministère en charge du commerce et de l’industrie, le ministère en charge de la loi, la justice, la police, les opérateurs économiques comme les responsables des restaurants, des hôtels, des boites de nuits, ainsi que les médias.
Qu'en pensent les acteurs culturels ?
Des actions ont été également menées sur terrain pour rencontrer et écouter les avis des acteurs culturels. Un consensus a été dégagé sur la politique culturelle à adopter pour les secteurs de l’audiovisuel, l’édition du livre, les spectacles vivants, etc. Ces réflexions devront aboutir à l’organisation des états généraux de la culture qui n’ont malheureusement pas eu lieu à cause des troubles politiques de 2015.
Simon kururu a d’ailleurs invité l’État burundais et tous les acteurs culturels à reprendre les débats afin d’organiser les états généraux de la culture qui aboutiront à l’adoption définitive de la politique culturelle nationale.
Mike Richard Nahimana, ressortissant burundais basé à Berlin en Allemagne qui gère une agence de booking et de management pour les artistes africains, membre de l’association Visage artistique du Burundi (VAB) depuis 10 ans, et engagé culturellement pour le développement des arts et de la culture au Burundi, pense qu’il appartient à un État d’élaborer sa politique culturel en tenant compte des contextes socioculturel, économique et politique du pays.
Il ajoute que le problème du Burundi est institutionnel, administratif et financier. Pour lui, il faut évaluer les structures, leur besoin ainsi que leur gestion, ensuite planifier, budgétiser et répartir les ressources. Ces réformes devront être pilotées par une institution publique qui pourra également associer des partenaires culturels privés.
Pour Monsieur Nahiman, se doter d’une politique culturelle n’est pas le plus important, car d’autres pays qui en possèdent sont tout de même inactifs sur le plan culturel. Selon lui, le plus urgent pour le Burundi est la mise en place de mesures d’accompagnement des textes déjà établis, comme la politique culturelle adoptée en 2007 ou encore les textes sur les droits d’auteur.
Il invite, à cet effet, l'État burundais à avoir une orientation claire sur sa politique culturelle et de mobiliser des fonds ainsi que des appuis techniques auprès des partenaires comme l’UNESCO ou l’Union européenne. Ces aides pourront aussi profiter au ministère de la Culture chargé d'accompagner le gouvernement dans le domaine culturel.
Mike Richard Nahimana affirme qu’en Afrique, compte tenu de peu des moyens disponibles des pouvoirs publics, le financement doit venir de l’extérieur. Il reste tout de même confiant quant à l’avenir du secteur au Burundi malgré les difficultés rencontrées par les opérateurs culturels tels que le manque d’infrastructures, notamment les espaces pour les résidences artistiques, des salles de spectacle et de cinéma.
Il invite le ministère de la Culture à tenir compte des aspirations des acteurs culturels du pays. VAB, sa structure, organise régulièrement des séances de réflexions avec d’autres professionnels. Ensemble, ils envisagent des synergies et des collaborations même sans l’appui des partenaires.
Les acteurs culturels, particulièrement les artistes, appellent à l’organisation des états généraux de la culture et l'adoption de la nouvelle politique culturelle du Burundi. Pendant ce temps, les organisations de la société civile, les institutions et d'autres acteurs continuent d'appuyer le secteur culturel. On peut ici faire mention du Projet d'appui sectoriel aux acteurs culturels et créatifs du Burundi (PASACC-BU) financé par la Commission européenne. L'initiative vise à renforcer les acteurs culturels et artistiques et leurs actions au pays.
Article édité par Walter Badibanga.
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