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Le rap Africain francophone fait-il du suivisme ?
Le rap à la base est une expression de revendication. Pour les pionniers de ce mouvement apparu aux USA, le socle premier était de lutter pour une égalité de traitement entre noirs et blancs à une époque où en Amérique, les luttes contre les inégalités raciales étaient d’actualité. En Afrique par contre il s’agissait pour le mouvement rap naissant des années 90 de revendiquer une certaine liberté d’expression ou un accès équitable aux richesses pour toutes les couches sociales. Aujourd’hui le contexte a changé. Le rap dans son ensemble a évolué autant dans la forme que dans le fond.
- (Ph) fatalcutentertainment.wordpress.com
Crise identitaire
Mais de quelle façon perçoit-on cette évolution en Afrique ? Certains approuvent le fait qu'aujourd’hui le rap soit plus accessible à d’autres formes de musiques et aborde d’autres thématiques plus choquantes (gangsta rap, blingbling, sexe etc.), d’autres par contre ressassent ce temps où le rap africain avait encore quelque chose à dire, avait une identité et était ce mouvement qui pouvait fédérer les masses.
Le rap africain s’est adapté à son époque. La globalisation aidant, tous les jeunes africains s’identifient plus rapidement au lifestyle américain, celui des « billets verts » et des « strippers », des rappeurs exhibant leur nouvelle Porshe sur Instagram ou sur Facebook. Les rappeurs africains sont tous donc tombés dans cette tendance. L’originalité prend un coup car tout le monde veut rapper comme Kaaris, Gucci Mane ou Migos. L’influence de la trap est sans pareille. Tous les sons ou presque, se ressemblent et suivent le même schéma.
Rester collé à la réalité
Mais tous ces clichés traduisent ils réellement le quotidien sur le continent ? Est-ce réellement ce que vivent nos jeunes ? Evidemment non. Nous ne souhaitons nullement dépeindre un tableau sombre de l’Afrique mais ne dit-on pas qu'il est important d’affronter ses démons pour les vaincre ? Ainsi, sommes-nous tous d’accord aujourd’hui que les artistes rappeurs devraient normalement se faire les défenseurs de tous ces maux qui minent le continent.
Entre Ebola qui gagne du terrain et la menace Boko Haram, le rappeur doit se faire le porte-voix de la jeunesse africaine qui le plus souvent n’a pas son mot à dire face aux politiques. Il ne s’agit pas que de dénoncer ou revendiquer mais de rester collé à ses réalités car ce ne sont qu'à travers celles-ci que se reconnaîtra le public. Telle devrait être à notre avis la démarche artistique dans laquelle devrait s’inscrire tout rappeur africain.
Nous avions connu l’époque Eedris Abdul Kareem, Positive Black Soul, Daara J, Raboon, Mauvaiz Haleine, Yeleen etc. et nous nous souviendrons encore longtemps de l’impact apporté par ces rappeurs ainsi que de leur influence sur la scène musicale. Non pas qu’il faille rester dans une logique archaïque et trop puriste de la musique mais savoir faire un véritable pont entre cette essence même du mouvement hip hop, notre identité et le courant actuel du secteur.
Cela revient à se donner une ligne artistique, à s’entourer des gens qu’il faut pour mener à bien sa carrière et surtout avoir une vision claire de ce que l’on veut. Nous avons néanmoins une frange d’artistes, qui bien loin de ces clichés prennent le pas s’efforcent à créer un melting pot, une fusion artistique entre culture US et culture Africaine. La musique du camerounais Jovi en est un exemple patent.
Au-delà même de la créativité dont ils font preuve dans le fond, ils essaient d’adapter la forme aux standards internationaux des rappeurs outre atlantique notamment à travers des vidéos et des visuels de facture honorable ainsi qu’un professionnalisme épatant.
Créer l’émulation
Il reste à beaucoup de rappeurs de rentrer dans la danse. Il ne faut pas plagier la culture américaine mais savoir l’adapter à nos réalités pour créer un truc différent de ce qui se fait habituellement. Un rap festif et commercial certes mais serait ce au détriment de l’essence même de cet art qu’est le hip hop ?
Nous pensons que le plus grand défi est de rendre le rap aussi original et plaisant que possible afin de créer un mouvement solide capable de s’exporter au-delà des frontières.
Article paru sur www.justraprnb.com
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