Hip-hop made in Bénin, état des lieux
La culture hip-hop fait son apparition au début des années 90 au travers de la danse comme dans plusieurs pays d’Afrique francophone.
Plusieurs groupes de danses à l’époque ont largement contribué à instaurer un mouvement hip-hop. Son expansion s’est surtout faite après le succès de certains groupes panafricains tels que Positive Black Soul (PBS) au Sénégal. Mais on peut surtout dire que le vrai déclic s’est produit en 1992 après le concert mémorable de Mc Solaar au Centre Culturel Français de Cotonou. Ce concert à révélé plusieurs rappeurs en herbes à l’époque qui deviendront plus tard des pionniers du hip hop Béninois tels que Ardiess, Sakpata Boys, H20 etc.
Les débuts du rap Béninois se sont fait en Français et en langues locales pour la plupart. Certains groupes comme Ardiess ou H20 ou même Sakpata Boys arrivaient à concilier les langues locales comme le fon, le yorouba ou le mina au français. On pouvait ainsi voir certains membres chanter en langues locales pendant que d’autres rappaient en français ou en anglais. Il s’agissait pour ces groupes de créer une certaine diversité dans leur musique tout en l’authentifiant par le caractère ethnique.
Le rap Béninois avait donc une identité même si elle n’était pas vraiment exportée au-delà des frontières locales. On verra l’apparition plus tard vers les années 2000 de plusieurs groupes comme Esprit Neg, Dhalai K ou le Private Club, issues d’écoles telles que Père Aupiais ou Montaigne. Cette génération a largement également influencé la culture hip hop au Benin car en majorité issue de l’époque Duel Cruels.
Il faut rappeler que les Duels Cruels sont une forme de concours Battle organisé par notamment le groupe Ardiess qui organisera également le premier festival de rap au Benin le Hip hop Kankpé. Au travers donc des Duels Cruels, qui se tenait au Centre Culturel Français de Cotonou, le hip hop Béninois amorcera un autre virage avec la découverte de plusieurs talents tels Esprit Neg, Sokrate, Systematik, Mutant, Cyano Gene etc…
Avant cela il faut noter l’effervescence engendré par des rappeurs tels que Kaysee Edge Montejano, Diamant Noir, Blasphem, Darkness etc… qui contribuèrent à donner un véritable coup d’accélérateur à la culture rap au Bénin en montrant le côté lyriciste de la musique et professionnel des clips vidéos. Des émissions radio tels Hip Hop au Top animé par El Pidio sur Radio Ocean, Big Tempo sur Radio Tokpa animé par Leonard Tea, Ghetto Blaster animé par Polo Orisha et Lil Blaster ont été des moteurs essentiels au rayonnement de la culture hip-hop au Benin.
Cotonou, capitale, du rap made in Benin
La scène urbaine était concentrée à Cotonou la capitale économique, mais plusieurs rappeurs venant de Porto-Novo qui est la capitale administrative du Bénin ont réussi à quand même se faire affirmer. On peut citer WP par exemple ou même Posse Etoc à l’époque. Malgré cela le pôle principal qui entretenait la fièvre du rap était basé à Cotonou, dû surement au fait qu’elle soit une plus grande métropole et aussi parce qu’elle abrite la plus grande partie des évènements majeurs comme concerts, battle, soirées etc…
D’autres éléments de la culture hip hop ont vu le jour à part le rap. La danse fait partie notamment de ces premières formes d’expression à avoir connu un essor notoire. Les rappeurs et les danseurs formaient en général une symbiose particulière contrairement aux autres formes tels que le graffiti, ou le deejaying. Le graffiti est resté longtemps inconnu et ne connaîtra une réelle ascension que les trois précédentes années, ce qui est beaucoup trop bien récent pour parler d’une scène graffiti au Bénin. Quant à la danse, depuis les années 2000 une floraison de groupes affirmaient déjà leur présence. On pouvait le remarquer dans les clips vidéo et lors des multiples battles organisé soit par les promoteurs culturels soit par les danseurs eux-mêmes. Ces battles pouvaient se tenir dans la rue ou dans des centres comme le CCF ou l’espace Tchiff.
Etat actuel
La scène hip hop actuelle connaît un essor non moins négligeable. Une multitude de groupes se sont formés et à part quelques rappeurs de l’ancienne génération qui résistent au gré du changement, une nouvelle scène totalement reformée a vu le jour. C’est ainsi qu’on assiste à un nouveau départ qui laisse à croire que le hip hop au Bénin amorce un nouveau virage. Plusieurs rappeurs se sont ouverts artistiquement à d’autres rythmes car ayant compris que le hip hop est aujourd’hui un melting pot. Les pionniers tels que Ardiess, H20 ; Sakpata boys ne sont plus vraiment en activité.
Un bon nombre de rappeurs ont réussi à se faire une place ces dernières années. Dibi Dobo fut l’un des premiers de la nouvelle génération à avoir bénéficié d’une grosse médiatisation à l’international notamment dû fait qu’il était signé par Nouvelle Donne Music. La scène locale par contre a connu une certaine émulation avec la présence de nouveaux rappeurs, jadis inconnus du public mais talentueux. Four Season par exemple est un collectif de jeunes rappeurs de la nouvelle génération qui s’est fait connaître en participant à beaucoup de concerts et en enchaînant les sessions freestyles. On peut citer également Vano Baby, vainqueur l’année passée du concours de rap organisé par l’opérateur mobile MTN. Ce qui lui a permis de bénéficier d’une promo non moins négligeable et donc ainsi de se faire une place parmi les nouveaux talents du hip-hop Béninois à suivre de près.
La diaspora béninoise compte quant à elle un nombre minime de rappeurs qui défendent tant bien que mal les couleurs locales. Au nombre de ceux-ci on peut citer Carpe Diem Music Label composé de Adek Darks, Kaizah et Xenos. C’est un label implanté en France et qui a su quand même s’intégrer en partie dans le milieu français. Ils font partie des rares rappeurs béninois de la diaspora à sortir des projets diffusés sur de gros médias en France tels que la chaine de télé M6. Ils collaborent également avec certains artistes locaux tel que Kemtaan qui aussi d’ailleurs était de la diaspora mais est revenu désormais vivre au Benin. Egalement Shamir MG, rappeur Béninois basé au Canada dont le récent projet « Transition » a d’ailleurs connu la participation de Kiff No Beat.
En résumé, le hip hop au Bénin connaît comme partout en Afrique francophone ces dernières années un regain d’intérêt. Non seulement de la part du public mais également des sponsors traditionnels tel les opérateurs GSM qui n’hésitent plus aujourd’hui à organiser des concours dotés de prix à destination des danseurs, ou des rappeurs. Les artistes sortent des projets même s’il reste encore beaucoup à faire au niveau de la qualité et essayent tant bien que mal de les défendre malgré le fait que les médias ne s’intéressent pas réellement à la culture hip-hop. Que ce soit CCC, Blaaz, Kemtaan, Reflex Entendements, 4 Season, Cyano Gene etc… le mouvement rap au Bénin ne manque pas de matière. Il convient donc de définir une politique fiable et surtout créer des réseaux afin de faciliter son exportation.
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