La « Troisième Vague » Touareg : les nouveaux héritiers de Tinariwen
Ces dernières années, nous sommes témoins de l'émergence d'une nouvelle génération dans la scène musicale touareg, que nous pouvons qualifier de « Troisième Vague ». Ces talentueux artistes originaires du Mali, du Niger, de la Libye et de l'Algérie incarnent la voix du peuple touareg, que l'on appelle communément « Tumast » (le peuple). Ils sont les dignes successeurs de Tinariwen, le groupe emblématique dont les mélodies extatiques ont jeté les bases d'une renaissance du genre assouf et de l'ishumar.
Music In Africa vous présente un aperçu de certains de ces artistes extrêmement prometteurs, qui sont en train de façonner l'avenir de la musique touareg
Kader Tarhanine (Mali)
Né à Bordj Baji Mokhtar, en Algérie, d’une famille d’origine malienne, Abdel Kader Sabou aka Terhanine s’impose vite comme le nouveau souffle de la musique touareg et l’artiste le plus écouté de sa génération. Avec son timbre de voix et son jeu de guitare, sa notoriété et son talent dépassent les frontières sahariennes pour conquérir la scène européenne. Ses succès comme « Terhanine Tegla » ( Mon Amour est partie), « Imanine » (dans mon âme) ou encore « Tarhanine » ( Diarabi) font danser tout le Sahel.
Ses nombreuses collaborations avec des artistes maliens de diverses ethnies comme Sidiki Diabaté, Fatoumata Diawara ou encore Vieux Farka Touré, le propulse au statut d’ambassadeur de la paix, et militant pour la cohésion sociale au Mali. Compte tenu du contexte socio-politique et des conflits interethniques qui secouent le pays.
Son manager Ehamatt Ag Elmedy, directeur artistique d’Essakane Prod et fondateur de Fadel Inter-Com se confie à Music In Africa en ces termes : « Les chansons de Kader véhiculent des messages de paix et d’amour. Selon lui sans paix rien n’est possible ».
Farees (Mali- Algérie)
Farees incarne un prisme singulier de la scène musicale touareg. A la croisée de plusieurs cultures et univers musicaux, il fait de son background multi linguiste et multi culturel sa plus grande force. D’une mère algérienne touareg et d’un père italien, il conjugue ses héritages en additionnant ses acquis au fil des ans.
Salué par la critique, son premier album Mississipi to Sahara (Rezart prod 2015) le fait propulser au-devant de la scène internationale, s’ensuit Border Patrol (Rezart prod 2020) et Blindsight (Rezart prod 2022). Ce dernier nous offre des « couches rythmiques » d'une grande richesse harmonique et des paysages sonores éclectiques et complexes.
Farees véhicule une vision plus universaliste de la création artistique, qui se veut également engagée et impactante. Sur le manifeste de son site web on peut y lire : « Le paradigme est en train de changer. Nous devons évoluer. Les artistes et la scène musicale doivent évoluer. Nous devons avoir une vision, une meilleure façon. Nous devons être dignes de confiance et cohérents. ».
Tassili (Algérie)
Le groupe Tassili a été créé en 2017 et se compose de quatre membres : Hachem Ben Kheridla (Lead vocal /guitare électro-acoustique), Abdelhakim Ben Khridla (guitare Bass), Troudi Redouane (guitare électrique), et Ben Souici Abd Naser aka Lakhdar au Djembè mais c’est sans contexte la voix de velours, l’aura et la force tranquille de Hachem qui nous interpelle le plus.
Tassili c’est avant tout, une histoire de passion, celle la musique africaine mais surtout de la musique touarègue en particulier. Tassili est le nom de l'un des massif montagneux situé au sud-est algérien. C'est dire l’attachement que portent les membres du groupe à leur culture et cela se laisse transparaitre à travers leur musique.
Une musique au service de la beauté, l’amour, la bravoure et le respect des femmes. Des thèmes inhérents à la culture locale du groupe. Avec un premier album en cours de réalisation, et plusieurs projets en devenir, Tassili nous promettent pleins de surprises.
Tikoubaouine (Algérie)
Le répertoire de Tikoubaouine gravite autour de thèmes majeurs de la musique assouf comme la paix, l’amour courtois, et la nostalgie tout en pointant l’index sur des problématiques sociales locales contemporaines. Avec Dirhan (2016), le succès est vite au rendez-vous. Le second album Ahney (Ostowana Music Algérie - 2019), nous offre un voyage sonore plus mature sur le plan technique, tout en de demeurant fidèle à l’esprit du band.
« Ligh ezzaman », leur chanson signature, devenue virale est sur toutes les lèvres en Algérie, du nord au sud, elle abolit les distances tant physiques que sociales d’un pays si vaste et multilinguistique.
Imarhan (Algérie)
Porté par le très charismatique Iyad Moussa Ben Abderhman aka Sadam, Imarhan a su insuffler une nouvelle énergie à la scène touarègue. Leur musique se veut la synthèse de leurs diverses influences avec pour substrat dominant, la musique assouf, qu’ils combinent à plusieurs autres sonorités subsahariennes mais aussi universel comme le rock et la pop.
Leur dernier album Aboogi (City Slang Label 2022), gratifié et acclamé par la critique arrive après deux premiers albums et s’impose comme l’accomplissement de plusieurs années de travail. Les Rolling stone, The Guardian, Pan African Music et plusieurs autres médias spécialisés sont unanimes : Imarhan, Rock it !
Mdou Moctar (Niger)
Avec plus d’une corde à son arc, Mdou Moctar pousse l'admiration. Il est chanteur, acteur mais surtout un guitariste hors pair. Il réinvente avec audace la musique saharienne contemporaine avec l’énergie d’un Eddie Van Halen mêlée aux airs traditionnels touaregs, comme il lui plait de le dire. Sa carrière à l’internationale débute avec sa rencontre avec Christopher Kirkley, founder du label Sahel Sound qui le convie à prendre part au projet Music from Saharan Cellphones : Volume 1 sorti en 2010 et produit par le même label.
Engagé, son dernier album Afrique Victime (Matador Records - 2021) met l’accent sur « Je veux que le monde sache que nous faisons de la musique pour promouvoir la paix dans le monde » argue t -il.
Tissilawen ( Algérie)
Tissilawen, C’est avant tout une histoire de famille, celle d’une amitié́ ineffable qui a donné naissance à ce groupe musical. C’est l’histoire de la rencontre entre Bakrin Timlfati et Cheickh Tabderni qui posa les premiers jalons d’une prometteuse collaboration. Par la suite, Manou (bassiste et guitariste), Smman Mefatih (percussion) rejoignent l’aventure. La musique de Tissilawen combine assouf, rock, rap, reggae et chaâbi algérien. Une musique qui revendique son ancrage identitaire tout en restant ouverte sur l’universalité.
Le groupe est l'un des pionniers d'une nouvelle tendance musicale appelée « Al Guitara ».
Aratan N’Akkalle (Mali)
Les Enfants du pays, telle est la signification du nom de groupe Aratan N’Akkalle en tamasheq (dialecte tamazight au Mali). Formé en 2012, le groupe connait le succès en 2021 avec leur premier album Manamosse Kel tamasheq (Guess Africa Label 2021). Enregistré au studio de Ali Farka Touré, l'album est le fruit d’une probante collaboration, avec pour directeur artistique Vieux Farka Touré, ou encore l’ingénieur son Eliezer Oubda.
Bariz, l’EP signature de l’album, nous plonge dans un tourbillon sonore.« la douceur d’un poème, sur un rythme endiablé ».
Nabil Bally (Algérie)
Issu d’une famille de musiciens et de mélomanes, Nabil est, à peine, âgé de 13 ans quand il intègre, en tant que guitariste, le groupe de son illustre père et grande figure de la musique algérienne : feu Athman Bally. Avec sa musique en héritage, il trace sa voie et s’établi en France où il peaufine sa musique. Toujours à l’affut, il collabore avec plusieurs artistes d'autres horizons comme Steve Shehan, Ibrahim Maalouf Adouk Trio. Son dernier album Amghar in est une douce invitation et un manifeste.
« Plus que jamais, la culture est porteuse d'espoir. » clame-t -il.
Doudou Tamasna (Mali – Algérie)
Doudou alias le Baroudeur est l’étoile montante de la nouvelle scène Touareg. Après plusieurs expériences collaboratives, il crée son groupe en 2017. Poète, auteur et compositeur aux multiples talents, il tisse un univers musical qui traverse le Sahara, de Timyawen (Algérie), jusqu’à la capitale malienne Bamako, en passant par l’antique cité de Tinbuktu.
Doudou glane au gré de ses expériences, une musique festive, engagée et éclectique.
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