Kane Limam : « une édition de renoncement et de recommencement »
Rencontré par Cheick Aïdara pour Music In Africa, le directeur du Festival Assalamekoum, Kane Limame dit Monza, est revenu sur la 11e édition de son spectacle, qui s'est achevée le 24 juin dernier. Il a notamment donné son impression sur l'organisation de l'événement et sur la collaboration avec les différents partenaires.
Le Festival Assalamalekoum vient de baisser ses rideaux, quelle impression vous laisse cette 11e édition ?
Cette 11e édition est une édition de renoncement et de recommencement. Une édition préparée ardemment avec comme souci principal de rendre service aux artistes, mais aussi de répondre aux interrogations et de tester une nouvelle quantification du public. Il est vrai qu'au bout de 10 ans nous avons fait dans le populaire en faisant venir des stars et des super-stars, en organisant des mégas concerts qui ont fait le plein, avec des incidents regrettables qui ont causé des blessés.
En tant qu'organisateur, nous en assumons toute la responsabilité. Nous avions toujours eu l'ambition de mobiliser et de renforcer les jeunes, d'assurer leur épanouissement à travers des sessions de formation et d'échanges, de les habituer à la prise de parole en public et de nourrir leurs talents.
C'est une édition de renoncement, car nous avons privilégié le local en choisissant volontairement et mutuellement un partenaire local, Africulturban du Sénégal, nous sommes concentrés sur l'Afrique pour répondre et célébrer simultanément l'intégration africaine, avec le sommet de l'Union Africaine, qui se prépare à Nouakchott, et surtout pour célébrer les 30 ans du hip-hop au Sénégal.
C'est dans ce sens et pour répondre à la quantification du public, que nous avons décidé de poursuivre des projets importants en invitant des groupes peu connus ici en Mauritanie, comme Fou Malade et Niagass du Sénégal, KT Gorique de Suisse ou encore Franco le Tunisien, Scoop et J.Kulz de France, pour développer la curiosité. Nous l'avons vu à l'IFM ; le vrai public d'Assalamalekoum n'était pas au rendez-vous, mais seulement des curieux qui sont venus découvrir des artistes qu'ils ne connaissent pas.
Cette édition est aussi celle du recommencement, dans le sens où elle a été marquée par la rencontre entre le hip-hop et les autres formes de musique. Le hip-hop aujourd'hui ne doit plus être une culture fermée aux autres, mais une culture du partage où se fondent nos identités plurielles, avec des groupes comme Walfadjri, Ehel Nana, etc. Au final, nous avons cherché à rester dans notre mission qui est d'accroître les potentialités de nos jeunes, parce que notre politique repose sur le décloisonnement et la proximité entre les créateurs et le public.
Les partenaires ont-ils répondu présents à cette édition d'Assalamalekoum ?
Si aujourd'hui le Festival Assalamalekoum continue de brandir son flambeau, c'est parce que nous avons réussi à créer des partenariats intelligents et solidaires dans la pertinence. Durant l'année, nous développons des stratégies de coopération avec nos partenaires structurels pour intégrer le contenu de nos programmes sur la base d'une économie opérationnelle capable, de permettre à nos activités de poursuivre leur lancée malgré l'indifférence constatée et non assumée de l'État et de ses services décentralisés.
Nous avons des partenaires fidèles avec lesquels nous développons des projets concrets, comme l'Institut Français de Mauritanie (IFM), l'Institut Français de Paris, le Service de coopération et d''Action Culturelle (SCAC) de l'ambassade de France en Mauritanie. Des partenaires qui nous soutiennent pour s'acquitter de leur devoir social d'entreprise, comme Kinross Tasiast, malgré l'absence de partenaires publics.
Nous développons aussi des partenariats pour la mobilité des artistes avec des organisations, comme Afrikayna pour les artistes marocains, avec des institutions publiques comme le ministère de la Culture de la Tunisie pour la mobilité des artistes tunisiens, de même que le programme régional de mobilité des artistes, Music in Africa Connects, qui nous a permis de mettre en place une mini-tournée à l'artiste malien, Tal B.
Notre programme sous-régional Focus Forum des Cultures du Sud (FFCS), piloté par Africulturban de Dakar, nous a aussi permis d'accentuer le développement de programmes comme Jokko Fam qui regroupe 4 femmes rappeuses du Mali, de la Mauritanie, du Maroc et du Sénégal.
Notre action n'est pas spécifiquement basée sur la levée de fonds, mais sur le développement de réseaux de collaboration pratiques et de mutualisation ainsi que sur des synergies solides pour la levée de possibilités. Nous avons compris que dans l'espace du continent, nous sommes ensemble et notre challenge est de rester ensemble.
Comments
Log in or register to post comments