Sheikha, une belle promesse
La seconde session du salon journalistique ouvert par le Goethe Institut du Sénégal, a été marquée par la prestation musicale du jeune chanteur sénégalais Sheikha. Retour sur l'événement.
Cheick Ismaïla Mbaye à l'état civil, Sheikha est un artiste de seulement 23 ans. Bien que sa discographie soit encore vierge, ceux qui le suivent dans les clubs et cabarets de Dakar (Sénégal) où il se produit souvent en live, disent que sa voix est une vraie promesse.
« On croirait écouter Faada Freddy en le voyant chanter » a sorti le journaliste Michael Soumah ce 13 juin à l'Institut Goethe de Dakar (Sénégal), pour lancer son petit showcase devant un public d'experts, et sous le regard d'une figure des musiques savantes du Sénégal, le Vieux Mac Faye.
Avec un classique du reggae, « Redemption song », le jeune chanteur originaire de la Medina, le vieux quatier dakarois, ouvre le spectacle autour de 16 heures (heure locale), dans le cadre intimiste de la salle Weimar.
En Sol majeur (la gamme de l'oeuvre originale), avec sa guitare folk, il fait le pari risqué de faire revivre la légende jamaïcaine Bob Marley.
Sheikha est à la hauteur de l'interpétation. Il aborde le morceau avec une remarquable aisance et une insouciance qui l'autorise à osciller entre le grave et l'aigu, pour le plus grand plaisir d'un public tout de suite captivé.
À sa reprise, il imprime un tout autre style que le reggae. La proposition prend un accent soul - rnb, les styles de prédilection de son frère et maître de chant Faada Freddy, qu'il imite jusque dans son style vestimentaire.
Avec son pantalon carrelé, son tee-shirt noir, ses baskets et son chapeau melon surmontant des dreadlocks, Sheikha incarne parfaitement les musiques urbaines.
La première performance du jeune chanteur, marquée par sa justesse et ses envolées vocales, est acclamée à juste titre par les journalistes culturels réunis dans la salle.
Pour la suite, Sheikha déroge aux Règles de composition éditées en 1690 par l'artiste baroque Marc-Antoine Charpentier, pour qui la gamme de Do majeur est censée traduire la gaieté et la bravoure.
Sur cette tonalité, il lance « Sorima », un morceau d'une douce mélancolie, qu'il a lui-même écrit pour parler de la séparation d'un couple.
Sheikha est de moins en moins dans la diction, mais plus dans l'émotion. Peu de mots prononcés, mais des murmures et des scats enchaînés en falsetto.
L'interprétation est sincère, de quoi laisser imaginer qu'il porte encore le poids d'un chagrin d'amour.
Qu'aurait-il fallu de plus ?
À mon humble avis, il manquait une petite cerise sur le gateau. « Il est un excellent chanteur et instrumentiste » a annoncé Michael Soumah au début du spectacle.
Si Sheikha a mis d'accord le public sur ses impressionnantes capacités vocales, sa maitrise de la guitare elle, n'aura pas vraiment été mise en lumière.
8 petits accords, c'est ce que le jeune artiste aura utilisé, pour accompagner très sobrement ses chansons. Le petit riff en prélude à « Redemption song » n'aura pas vraiment suffit pour emporter le public.
Aussi, sa gestion de la scène aura été trop prudente. Debout et les jambes croisés, il se sera sagement installé sur deux carreaux de la salle Weimar du Goethe Institut, sans jamais se déchaîner à la façon d'un Bob Marley.
La voix soul du jeune chanteur nous aura enchanté c'est sûr, mais il lui serait très profitable, je le crois, d'ajouter la petite touche d'africanité qui lui conférera cette originalité recherchée.
Qu'à cela ne tienne, les petits manquements notés n'altèrent en rien, l'excellente qualité du spectacle offert par Sheikha ; au contraire, ils nous rappellent que rien n'est jamais parfait et qu'à 23 ans, on a encore beaucoup de choses à apprendre, et bien plus encore à démontrer.
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