Lydol : « Le slam m'a aidée à soigner mes maux par des mots »
De passage à Dakar (Sénégal) pour boucler son Slamthérapie Africa Tour qui l'a menée dans des pays comme le Congo, le Tchad ou encore le Burundi, l'artiste camerounaise Lydol que nous avons reçue dans nos locaux, a accepté de nous parler de son parcours et de sa passion pour le slam.
Bonjour, pourrais-tu nous dire en quelques mots qui est Lydol ?
Lydol c'est moi (rire) ! Plus sérieusement, Lydol est une jeune femme qui a choisi d'utiliser les mots comme une thérapie. Je suis une artiste slameuse, poète et auteure.
« Utiliser les mots comme une thérapie », pourrais-tu nous en dire plus ?
Le slam m'a aidée à soigner mes maux par des mots. J'étais un enfant timide qui ne partageait pas ses pensées ; j'étais vraiment très introvertie.
« Garçon manqué », j'étais au cours de mon adolescence, pas assez garçon pour traîner avec les garçons, ni assez fille pour être avec des filles, j'étais donc seule dans mon coin et je ne me confiais qu'à mon journal. J'écrivais beaucoup et dans mon miroir, je voyais une amie imaginaire à qui je lisais tout.
Mais un jour, je suis montée sur une scène de slam pour présenter un texte que j'avais écrit pour les enfants de la rue, une femme est venue me remercier à la fin du spectacle, affirmant qu'elle s'était vraiment retrouvée dans ma plume. Cette expérience m'a permis de comprendre que je n'étais pas seule et que mes mots pouvaient atteindre d'autres personnes et leur faire du bien.
La fillette timide a fini par devenir une slameuse connue, qui n'hésite pas à monter sur scène et à faire face au public. Comment expliquer cette métamorphose ?
Au collège, j'ai rencontré Sandrine Nnanga, une ex-chanteuse du groupe Ma Case que j'admirais vraiment. Je ne la voyais que de loin mais en seconde, nous nous sommes retrouvées dans la même classe et je n'en revenais pas. Je lui ai demandé de m'apprendre à chanter comme elle.
J'ai gagné en confiance grâce à son coaching et pendant les grandes vacances, je me suis inscrite à la compétition d'art, Challenge Vacances de l'Institut Français du Cameroun, et j'ai atteint les demi-finales du tournoi. Je me suis présentée à nouveau l'année suivante mais j'ai été recalée dès le casting. Les organisateurs du tremplin m'ont expliqué que je pouvais néanmoins me présenter dans une autre catégorie que le chant.
Un ami artiste, Moustik charismatik, m'a conseillée d'essayer le slam, qu'il m'a présenté comme une façon de faire de « la poésie autrement ».
J'ai écrit et présenté un texte qui m'a permis d'être retenue et j'ai finalement remporté le tournoi en 2010.
9 ans après ce grand début (2010 - 2019), quel bilan dresses-tu de ton parcours ?
De 2010 en 2013, même si j'avais gagné le concours de l'Institut Français, je ne réalisais pas encore que je pouvais faire carrière dans le slam ; pour moi c'était tout sauf un métier.
Mais en 2013, j'ai participé à une compétition, Science Slam, organisée par le Goethe Institut cette fois. J'ai été désignée championne nationale et j'ai représenté le cameroun à une compétition panafricaine de slam à Luanda (Angola), non en tant que candidate, mais en guest.
J'ai vu des gens venir me suivre et prêter attention à ce que je disais, j'ai assuré l'animation de quelques ateliers d'écriture et les participants étaient vraiment intéressés.
Au sortir de cette aventure, j'ai compris que le slam est une chose plus grande qu'écrire simplement ou monter sur scène. J'ai décidé d'en faire mon métier.
Avec le collectif 237 Paroles dont je suis membre, nous avons parcouru des localités au Cameroun pour populariser un peu le slam qui n'est pas vraiment connu du grand public.
En 2014, j'ai été retenue pour participer au Poetry Africa en Afrique du Sud. Il s'agit de l'un des plus grands concours de poésie du continent.
Deux ans plus tard, en 2016, c'est sur la scène du tremplin l'Afrique a un incroyable talent que je suis passée et cela m'a permis de gagner en visibilité. Ma prestation a été suivie par plusieurs milliers de téléspectateurs et dans la rue, les gens me reconnaissaient. Je me suis sentie comme investie d'une mission dorénavant, celle de partager mon art avec le public.
Qu'as tu justement offert à ton public ?
En 2017, j'ai sorti mon tout premier single, « D'un autre », qui est un fragment de mon premier album, Slamthérapie, paru en 2018. Le Slamthérapie Africa Tour, c'est justement la tournée panafricaine de promotion de cet opus.
Pour intéresser davantage le public, j'ai donné une toute autre orientation à mon art. Je n'écris plus seulement pour panser mes propres peines, mais j'aborde des thématiques plus larges, des questions qui touchent à la société.
J'ai également lancé un concept calqué chez un ami allemand, le Science Slam. Il s'agit d'un spectacle organisé chaque année au Goethe Institut du Cameroun, qui donne à des étudiants chercheurs et des scientifiques, la possibilité de monter sur scène et de partager leur savoir de façon plus ludique et amusante en slam. Le concept réunit plusieurs personnes et il en est à sa 8e édition. Pour moi, c'est une vraie fierté.
En 2018, j'ai aussi lancé avec un ami, Ulrich Takam, le SlamUp, qui est un festival de slam et de stand-up. Nous proposons des ateliers à cette occasion pour initier les tous petits à la pratique de ces arts et nous donnons des conférences sur différentes thématiques (violence, différence, etc.)
Vous avez là, l'essentiel de ce que j'ai proposé à mon public.
Un mot pour ton public et tes fans Lydol ?
Juste merci pour l'intérêt qu'ils accordent à ce que je fais et pour la passion du slam.
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