![Burundi BI](https://www.musicinafrica.net/sites/all/modules/contrib/countryicons_gosquared/flat-large/bi.png)
La musique traditionnelle au Burundi
Par Jean Baptiste Karegeya
Le Burundi traditionnel ancien présente un précieux héritage instrumental régissant sa musique traditionnelle. Cependant, de nos jours, certains artistes résistent à cette tradition alors que dans les pays voisins, une telle histoire est déjà presque oubliée. Dans les lignes suivantes, nous aborderons la musique traditionnelle du Burundi, sa situation actuelle ainsi que les perspectives de protection contre sa disparition.
- Tambourinaires du Burundi.
Jusqu’à présent, le Burundi a maintenu sa tradition musicale basée sur l’utilisation d’instruments traditionnels tels que l’Inanga (cithare), Amayugi (grelots), Ikembe (lamellophone), Indingiti (vièle), Ingoma (tambour), Inzamba (trompe), Umuduri (arc musical), et l'Umwironge (flûte). Chaque instrument a une forme distincte et la musique qu’il produit a une connotation particulière.
Inanga (Cithare)
L’Inanga est un instrument traditionnel autrefois joué à la cour royale pour divertir le roi. Les organologues désignent l’inanga comme une ‘cithare sur cuvette’, ce qui fait référence à la forme de l’instrument. Ce dernier est monté sur une caisse de résonance plate, avec des bords légèrement incurvés vers le haut. Cette caisse est un peu plus petite, car elle est entourée d’une bordure. Aux extrémités, ce rebord est beaucoup plus large et comporte 8 à 12 incisions qui maintiennent les cordes en place. L’Inanga a une signification particulière. Comme le tambour, ses parties sont assimilables au corps humain comme l’explique l’artiste burundais Niyonizigiye. Les différentes parties représentent des parties du corps telles que le ventre, le dos, les yeux.
Ingoma (Tambours)
Le tambour burundais est un instrument de musique composé d’un tronc découpé dans certaines espèces forestières. Ce morceau de tronc creux est tendu avec un cuir de vache, fixé au bois avec des goujons en bois. Généralement, le tambour est joué à l'aide de baguettes. Les rythmes des tambours du Burundi sont particuliers surtout avec leur jeu de scène très spectaculaire.
Au Burundi, le terme « ingoma » est doté d’un très vaste champ sémantique, qui peut signifier : tambour de batterie, tambour rituel, tambour dynastique, pouvoir (royauté ou autre) règne (ou équivalent), gouvernement, époque, tel pays (royaume).
Dans le passé, personne ne pouvait fabriquer ou faire fabriquer un tambour sans l’ordre formel du roi qui seul avait le privilège de posséder les tambours et de les faire battre pour lui-même.
En 2014, les tambours burundais ont été classés par l’UNESCO dans le « patrimoine de l’humanité ».
Dans le Burundi ancien, les tambours objets sacrés, réservés aux seuls ritualistes, n’étaient battus que dans des circonstances exceptionnelles, c’est à dire, dans les grands événements du pays - intronisations, funérailles de souverain - et rythmaient, dans la joie et la ferveur de tous les Burundais.
En 1983, les chercheurs Léonidas Ndoricimpa et Claude Guillet ont écrit : « De nos jours, le tambour reste un instrument à la fois vénéré et populaire, réservé aux fêtes nationales et aux hôtes de marque. Les anciens lignages de tambourinaires ont maintenu vivant leur art et, pour certains, l’ont fait connaître avec un grand succès dans le monde entier ».
Ikembe (Lamellophone)
L’ikembe appartient à la catégorie des lamellophones et est composé d’une caisse de résonance rectangulaire en bois sur laquelle sont montées des tiges de fer. Dans l’histoire de la musique traditionnelle au Burundi, l’ikembe n’a été introduit qu’au début du vingtième siècle, importé du Congo à l’époque de la colonisation belge. Deux peuplades ont assuré cette diffusion : les Kongo et les Bangala. Ils jouaient de cet instrument pour s’accompagner dans leurs chants en solo. Au Burundi, les ikembe étaient produits par les Twa. Les chants accompagnés à l’ikembe sont soit des histoires chantées pour le divertissement, soit des hymnes à la gloire des autorités, soit l’expression de sentiments personnels.
Umwironge (Flûte)
L’umwironge fait partie des aérophones et est une flûte réalisée à partir de la tige de la plante « intomvu », souvent en bambou ou d’autres plantes. Cet instrument de 49 à 75 cm est fabriqué à partir de tiges jeunes, séchées et vidées. L’instrument se rétrécit légèrement de haut en bas sur toute sa longueur. Les parois étant très fines, cet instrument est très fragile et doit donc souvent être réparé (ou jeté).
Les umwironge étaient surtout utilisés par les pâtres, pour passer le temps ou pour tenir à distance les éventuels voleurs de bétail ou les prédateurs, la nuit.
Mais l’instrument avait aussi sa propre signification symbolique, comme la fertilité de l’homme, de la terre et du bétail. À ce titre, il était aussi utilisé dans un contexte rituel lors des semailles et des plantations.
Ces instruments traditionnels ont toujours donné une saveur à la musique burundaise, et même aujourd'hui, de sorte que certains d'entre eux, comme des tambours, font l'envie des pays voisins.
Les artistes actuels face à la musique traditionnelle
Les jeunes artistes burundais sont peu nombreux à s'intéresser à cette musique basée sur des instruments traditionnels que certains décrivent comme archaïque.
Jérémie Hatangimana joue du tambour et de la flûte. Il indique qu’actuellement les jeunes semblent être emportés par la musique moderne. « Ils investissent dans des instruments modernes automatiques, parfois, ils ne peuvent pas manipuler et produisent ainsi une musique qui qui disparaît le lendemain de sa sortie …. Lorsque vous jouez d’un instrument, c’est à ce moment-là que vous êtes rempli d’inspiration », a déclaré Hatangimana.
Pour lui, l’initiation de jeunes artistes à la manipulation d’instruments de musique traditionnels constituerait une bonne base pour une musique authentiquement burundaise et durable.
« Dans l’air de la technologie, il n’y a pas de temps à perdre pour aller fabriquer ces instruments traditionnels dont les sons se retrouvent facilement dans les instruments modernes comme le synthétiseur, le piano, ... », réplique, Eugene Niyindorera, artiste moderne burundais en exil au Rwanda.
De son côté, Anicet Icimpaye, jouant de la cithare, pense que même si la musique burundaise n’échappe pas à la technologie moderne, elle ne doit pas être complètement perdue. « Elle doit préserver son originalité qui repose sur sa musique traditionnelle mise en œuvre dans la manipulation de ses instruments », conclut-il.
Les conservateurs attribuent le comportement de la jeunesse à la paresse et au désir de vouloir s'enrichir facilement en ne pensant pas laisser de morceaux de musique qui seraient durables.
Sur la voie de la préservation du patrimoine musical traditionnel
Selon les recherches de l’Institut de Musicologie de Gitega, la musique traditionnelle du Burundi est menacée de disparition. Elle fait face au manque de vision de la responsabilité des aînés à qui incombe le rôle capital de transmettre les richesses artistiques traditionnelles aux générations à venir. Elle souffre aussi d'un manque d’une prise de conscience nationale quant à la sauvegarde des valeurs artistiques, dont les instruments musicaux traditionnels, qui doivent rester perpétuellement une des facettes de l’identité culturelle du pays au sein du concert des nations.
Enfin, le pays manque d’un programme national concret d’éducation de la jeunesse afin de les inciter à aimer et pratiquer l’usage de ces instruments musicaux traditionnels.
Mgr Justin Baransananikiye, chercheur, professeur de musique, Directeur fondateur de l’Institut de Musicologie de Gitega, croit qu’il n’est jamais trop tard pour agir et susciter une prise de conscience. Cela honorerait ces instruments et contribuera à leur préservation.
Selon ce conservateur, l’avenir culturel du Burundi en matière de musique, ne pourra évoluer que quand les élites universitaires l’auront pris en mains.
En plus, Mgr Baransananikiye conseille aux chanteurs/musiciens burundais qui veulent vraiment faire carrière au niveau international, de rester authentique et promouvoir les couleurs traditionnelles burundaises sous les trois piliers : l’art original traditionnel, des instruments traditionnels et une expression poétique lyrique soignée du Kirundi.
Ressources et citations :
[1] http://www.rfi.fr/afrique/20141127-tambours-burundi-inscrits-patrimoine-mondial-unesco
[2] http://www.musicologygitega.wordpress.com
Avertissement/Clause de non-responsabilité
Les aperçus de Music In Africa fournissent des informations générales sur les scènes de musique dans les pays africains. Music In Africa comprend que l'information contenue dans certains de ces textes pourrait devenir dépassée avec le temps. Si vous souhaitez fournir des informations plus récentes ou des corrections à l'un de nos textes, veuillez nous contacter sur info@musicinafrica.net.
Édité par Walter Badibanga
Most popular
Related articles
![Burundi BI](https://www.musicinafrica.net/sites/all/modules/contrib/countryicons_gosquared/flat-large/bi.png)
![Burundi BI](https://www.musicinafrica.net/sites/all/modules/contrib/countryicons_gosquared/flat-large/bi.png)
![Burundi BI](https://www.musicinafrica.net/sites/all/modules/contrib/countryicons_gosquared/flat-large/bi.png)
![Burundi BI](https://www.musicinafrica.net/sites/all/modules/contrib/countryicons_gosquared/flat-large/bi.png)
![Morocco MA](https://www.musicinafrica.net/sites/all/modules/contrib/countryicons_gosquared/flat-large/ma.png)
![Burundi BI](https://www.musicinafrica.net/sites/all/modules/contrib/countryicons_gosquared/flat-large/bi.png)
![Burundi BI](https://www.musicinafrica.net/sites/all/modules/contrib/countryicons_gosquared/flat-large/bi.png)
![Burundi BI](https://www.musicinafrica.net/sites/all/modules/contrib/countryicons_gosquared/flat-large/bi.png)
![Burundi BI](https://www.musicinafrica.net/sites/all/modules/contrib/countryicons_gosquared/flat-large/bi.png)
Comments
Log in or register to post comments