Ami Yerewolo : « Mon plus grand rêve est de lancer un festival de rap pour femmes »
Après son passage à Dakar pour la 13e édition du Festa2H, la rappeuse malienne Ami Yerewolo s'est rendue à Nouakchott (Mauritanie) pour la 11e édition du Festival Assalamalekoum où elle était attendue. Rencontrée par Cheick Aïdara, la jeune artiste s'est confiée sur son collectif Jokko Fam et sur ses projets, pour Music In Africa.
Vous avez renoué avec le public mauritanien qui vous connaît déjà, car c'est votre deuxième participation au Festival Assalamalekoum, comment avez-vous vécu ce retour en terre mauritanienne ?
C'est vrai que c'est la deuxième fois que je reviens en Mauritanie dans le cadre du Festival Assalamalekoum et je suis fière de cette aventure. Je considère en effet que ce festival est l'un des plus grands de hip-hop non seulement en Afrique, mais aussi dans le monde. Cette fois-ci je suis là dans le cadre d'un groupe, celui de Jokko Fam, qui regroupe quatre artistes femmes, une Malienne (moi, rires), une Mauritanienne, une Marocaine et une Sénégalaise.
Lors de votre prestation le 23 juin à l'Institut Français de Mauritanie à Nouakchott, vous avez présenté plusieurs titres, parlez-nous un peu de l'arrangement de ces chansons ?
Durant notre précédente sortie, chacune d'entre nous avait présenté ses propres chansons, mais dans cette présente édition du Festival Assalamalekoum, nous avons produit 7 chansons sous le titre générique de « Basta », où nous avons traité de plusieurs questions qui reflètent les difficultés auxquelles fait face l'Afrique, comme le problème de la monnaie, des frontières, etc. Alors, nous avons composé des chansons en chœur où les autres apportent leurs notes sur celles présentées par l'une d'entre nous.
Comment en tant que femme, vous vivez votre statut d'artiste rappeuse dans une mode musicale dominée par les hommes ?
Vous touchez du doigt l'une des plus grandes difficultés auxquelles font face les jeunes filles qui veulent faire du rap. Les règles de la société condamnent déjà la femme africaine et le milieu hip-hop est dominé surtout par les bad boys qui n'acceptent pas pas le fait qu'une femme puisse les supplanter. Et pour une jeune fille peu armée, il est difficile de conserver sa place. Toutes mes aînées qui m'ont devancé dans le rap au Mali ont décroché face à toutes ces difficultés et je suis pratiquement la seule rappeuse au Mali. Mon ambition est de former les jeunes filles maliennes qui s'intéressent au rap et à qui je veux donner les moyens de s'exprimer, et surtout de résister à toutes ces pesanteurs. Pour me résumer, il est très difficile, c'est presque un exploit, que d'être une femme dans ce milieu et de conserver son statut.
En matière de soutien et de sponsor, bénéficiez-vous des mêmes facilités que les hommes ?
D'une manière générale, le rap est peu soutenu au Mali déjà pour les hommes, alors que dire des femmes. Depuis que je me suis lancée dans le métier, je n'ai jamais reçu la moindre aide. La preuve, je finance mes productions à partir de mes fonds propres, ce qui m'oblige à travailler pour le faire. Trouver un partenaire, c'est difficile et sur 100 concerts organisés, c'est à peine si on m'offre 1 ou 2 prestations, malgré le fait que je sois la seule rappeuse. On me met systématiquement à l'écart. Et j'ai compris pourquoi toutes les femmes qui se sont essayé au rap ont finalement abandonné. C'est pourquoi je remercie et je félicite ceux qui ont eu l'idée de mettre en place le groupe Jokko Fam, qui donne de la place aux femmes et leur permet de voyager, de faire des rencontres, de développer des échanges, tout comme je remercie le Festival sur le Niger, le Festa2H de Dakar, L'Boulevard de Casablanca, et bien sûr le Festival Assalamalekoum, qui nous ont toujours associées et soutenues.
Des projets d'avenir ?
Je suis sur mon 2e album, un rêve pour moi, et un titre « Mon combat », qui résume tout mon parcours. J'ai lancé il y a 2 ans au Mali un concours de rap féminin pour aider les jeunes filles. La prochaine édition de ce concours aura d'ailleurs lieu le 28 juillet prochain. Mon plus grand rêve est de lancer dans 2 ans, un festival de rap exclusivement féminin. En attendant, je me concentre sur mon prochain album.
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