De Batoro : poète, politique, gardien de la tradition orale
Sa musique est construite autour de rimes et de versification, ses thématiques sont un engagement profond sur l’Afrique. Partout où le tam-tam résonne, Donsharp De Batoro donne de la voix comme source de mémoire, source d'amour pour le frère à la peau sombre, mais aussi source de revendication et d’espoir. D’ici et d’ailleurs, il se revendique un statut de gardien du temple de la tradition orale dont il a fait une arme et un instrument d’identification sociale.
Donsharp De Batoro en douze années de carrière musicales en Afrique de l’ouest, a laissé son empreinte à travers un genre dont lui seul sait définir. Parolier, comme il se fait appeler, ce sont des essais et récits connus et reconnus au Burkina Faso ; des œuvres autobiographiques, à la fois, de la satire sociale, des manifestes poétiques et politiques pour le triomphe du panafricanisme, qu’il offre aux mélomanes. « Parenté à plaisanterie », « L’Afrique vous parle », « Africa Téré », « Je viens de là », « Soundjata », … font autant partie d’une discographie plaisante mais en guerre contre la mondialisation au nom de son continent, l’Afrique.
L’appel des origines
Si le parolier, Donsharp De Batoro se singularise par sa façon de faire, il n’a pas toujours été ainsi car, avec « Parenté à plaisanterie » en 2008, son premier album, qui a marqué le début de sa carrière musicale, De Batoro était inscrit dans différents registres de musique urbaine, saupoudrée d’un rythme du terroir gourounsi au Burkina Faso, le Binon. C’est en 2009, au décès de son père, de retour auprès de sa famille que l’histoire va s’écrire autrement. Il s’inspire désormais de son devancier, Bomou Mamadou, avec l’aide et les conseils d’un ainé, dit-il.
« Cet aîné, Ibrahim Ologuem est celui qui m’a offert mon premier texte dans cette façon de faire. De l’art oratoire africain à l’ancienne, et depuis, je fais cette musique de fusion entre paroles et instruments pour mieux véhiculer mes messages », explique De Batoro, le griot des temps modernes.
Quand on dit que le voyage reste la plus grande université du monde, Donsharp De Batoro l’a bien compris. Son art traverse les frontières et répond à une utilisation variée d’instruments de musique. C’est ainsi, qu’entre autres, il invite la flute malinké pour rendre hommage à Soundjata ou la guitare électrique pour parler d’auto-emploi en passant par la guitare traditionnelle, kundé ou des notes de clavier, de balafon ou de tam-tam pour faire danser le binon et abordé différents thèmes.
Œuvres éminemment engagées, la musique de Donsharp De Batoro touche à tout : les valeurs culturelles, l’écologie, la justice sociale, les conditions de la femme, la perfidie des outils de communication, la dette, la migration, etc. L’artiste ne manque pas de faire une introspection en déclamant des épigrammes à charge contre la société dont il est issu. Il offre tout simplement à écouter des mots poignants sur des rythmes d’instruments du monde.
Si dans ces œuvres, De Batoro manie bien la langue de Molière, celle du colon, il fait également étalage d’une parfaite maîtrise des rythmes Binon de chez lui et de sa langue maternelle Lyélé.
Des sciences à la musique
Donsharp De Batoro, né Seydou Batoro à Yamoussoukro, après son baccalauréat rejoint la terre de ses ancêtres, le Burkina Faso. Là-bas, il est prédestiné à une carrière de scientifique par son choix d’études à l’université de Ouagadougou. Cela est de courte durée avant que l’art ne prenne le dessus, après un bref passage dans une entreprise comme agent commercial. Issu d’une famille nombreuse, De Batoro est fils d’un pépiniériste. Toute chose qui a sans doute influencé, son parcours, sa carrière et ses productions. Lui, devenu fleuriste du verbe, il fait ressentir cette filiation par la beauté de ses textes et son souci du détail.
Invité dans plusieurs pays pour apporter sa voix à travers sa musique dans plusieurs évènements du monde, De Batoro a ouvert une brèche et donné la voie à un genre de rythme et d’artistes, slameurs, paroliers, etc… au Burkina Faso, sur des scènes autrefois réservées.
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