Être musicien au Cap-Vert : mode d'emploi
Manuel à l'usage des artistes cap-verdiens souhaitant développer leur carrière sur le territoire et à l'International.
Comment se structure le milieu musical cap-verdien ? Comment un musicien gagne-t-il sa vie au Cap-Vert ? Quelles sont les opportunités pour lancer, développer ou étendre sa carrière à un niveau local et international ? Qui rencontrer et où trouver les interlocuteurs privilégiés pour construire son projet musical dans cet archipel au large de l'Afrique de l'Ouest ? Ce sont toutes les questions que peut se poser l'artiste cap-verdien en développement. Voici ci-dessous des pistes d'idées et des initiatives pouvant l'aider à se propulser sur le devant de la scène.
Être artiste cap-verdien : des opportunités mais pas pour tout le monde !
La structure du réseau musical au Cap-Vert est ainsi faite que seul un petit nombre d'artistes cap-verdiens vit convenablement de son art. José Da Silva, directeur du Kriol jazz festival, d'Atlantic music expo et du label cap-verdien Harmonia Lda, nous confie à ce propos que le Cap-Vert ayant une économie à l'européenne, les bons musiciens s'en sortent bien. Ils n'arrêtent pas de travailler. Les musiciens traditionnels, quant à eux, gagnent de plus petits cachets. Cela est plus difficile pour eux.
Les festivals, majoritairement liés aux municipalités, fonctionnent sur un système électoraliste. Quand les élections approchent, les mairies mettent les bouchées doubles en offrant à leurs futurs électeurs des festivités grandioses. Autant d'arguments pour se faire ré-élire, quitte à dépenser énormément d'argent et inviter des têtes d'affiches tels Alpha Blondy ou Kassa'v. Aussi, José Da Silva nous précise en se faisant la concurrence entre mairies pour avoir le plus gros concert qui marquera les esprits. Ainsi, les dix artistes les plus connus du Cap-Vert vont pouvoir réaliser une tournée des festivals mais pas les plus petits.
Par ailleurs, le Cap-Vert demeure dans une dynamique artistique relativement insulaire et exclusivement lusophone. Loin de se servir du savoir-faire de certains de ses voisins du continent - Seules, quelques rares collaborations avec le Sénégal sont à noter– il a plutôt tendance à se tourner vers les pays dans lesquels la diaspora est implantée. Dès qu'un artiste a du succès, il part en tournée aux USA, au Portugal, en Hollande.
Un milieu professionnel peu structuré mais un foisonnement d'événements musicaux
Au Cap-Vert, les industries musicales sont quasi inexistantes. Très peu de bookeurs, de producteurs et d'organisateurs d'événements. Et les rares individus œuvrant dans le milieu musical sont pour une bonne part des professionnels autodidactes, formés sur le tard.
Trois producteurs sont néanmoins solidement implantés au Cap-Vert. Harmonia Lda[1] fait figure de pilier. La structure distribue des spectacles cap-verdiens et elle produit notamment les œuvres de Césaria Evora, Lura et Elida Almeida. Broda Music est un label indépendant produisant les œuvres de Djodje, Ricky Boy, Kady et Mário Marta. Son d'Africa produit Sara Tavares, Ana Lopes, Calema et Johnny Ramos.
Il existe au Cap-Vert plus d'une quarantaine de festivals ! Pour un tel territoire, relativement peu étendu, le nombre est assez exceptionnel. Et pour l'artiste talentueux souhaitant développer sa carrière au sein de l'archipel, l'équation est donc à priori assez simple. Pas d'intermédiaire donc, système débrouille et auto-management chevillé au corps.
L'artiste en développement n'a ainsi plus qu'à retrousser ses manches, se rendre dans les différentes mairies de l'archipel, prendre contact avec l'adjoint à la culture et tenter de mettre en place une petite tournée au sein des différents festivals du Cap-Vert. Après avoir organisé cette série de dates de concerts dans les différentes îles, il devra se rendre à la capitale. Là, se trouvent plus de la moitié des festivals du pays. Bars, restaurants et café-concerts de Praia constituent également un vivier quasi inépuisable de lieux permettant d'être programmé toute la sainte semaine. La capitale est donc l'étape secondaire et incontournable de la vie de l'artiste cap-verdien.[2]
Ainsi, au Cap-Vert l'absence de structures de soutien aux artistes, est compensée par quantité d'événements, d'institutions et d'interlocuteurs agissant dans le domaine musical. Ce sont autant d'aides informelles précieuses dont il faut savoir user en bon stratège et avec tout son talent d'auto-promoteur et d'auto-manager pour se faire une place sur la scène musicale cap-verdienne.
Aide à la création musicale au Cap-Vert et à l'International
Il n'existe au Cap-Vert aucun mécène, média ni institution officiels proposant des bourses ou du sponsoring aux artistes cap-verdiens. Encore une fois, le système est à la débrouille et la plupart des artistes auto-produisent leur album. Et lorsqu'ils ont un sponsor, c'est qu'ils l'ont eux-même déniché.
Malgré le manque de structuration du milieu, voici cependant ci-dessous quelques pistes à explorer pour mettre un bon coup de fouet à sa carrière musicale au Cap-Vert et à l'International.
- Il existe un concours national organisé en collaboration avec les différentes municipalités du pays. Todo mundo canta invite chaque artiste cap-verdien à se produire sur scène et à avoir ainsi la chance de représenter sa région. Le concours a d'abord lieu à l’échelle régionale, puis nationale. Il offre aux finalistes une visibilité inédite, un sacré coup de projecteur sur leur projet artistique et l'occasion de rayonner à un niveau local et national.
- Le prix découvertes RFI[3] existe depuis presque 40 ans. De Fally Ipupa à Jacob Desvarieux, Youssou N’Dour, Angélique Kidjo, Richard Bona, Kery James ou Asalfo,... son jury se compose chaque année de professionnels du milieu et est présidé par une personnalité du monde de la musique. Le prix constitue l'opportunité pour les artistes africains de bénéficier d'une tournée sur le continent, d'un concert à Paris, d'une exposition médiatique et d'un soutien professionnel.
Pour candidater, déposer son dossier en ligne avant le 1er juillet de chaque année.
D'autres opportunités existent en dehors du Cap-Vert. Il suffit de se tenir informé grâce aux réseaux d'artistes du continent et en naviguant sur les bonnes plate-formes Internet. Music in Africa, en est une.
Le projet Wanda full artistik concret de l'artiste camerounais Blick Bassy exposé dans un des articles du site Internet est d'une grande utilité pour mieux comprendre le fonctionnement du milieu de la musique à l'ère de la mondialisation.[4]
Show-me, le premier marché musical live et online publie sur le blog de son site Internet du contenu intéressant pour l'auto-développement de carrière des artistes en Europe ou en Afrique.[5]
Enfin, certaines institutions cap-verdiennes sont sans doute de bonnes sources d'informations pour tout artiste souhaitant développer son projet. La SCM[6], société gestionnaire des droits d'auteurs des artistes cap-verdiens peut être un lieu ressource à explorer. La structure est très jeune, environ trois ans d'existence, elle va probablement grandir en compétence et aider à la professionnalisation du secteur. Le ministère de la culture cap-verdien est également une autre piste à emprunter.
Ainsi, un artiste sans structure de soutien doit prioritairement s'auto-former, être son propre manager et/ou son propre producteur, aller chercher lui-même les informations ou les individus qui vont l'aider à développer son propre projet artistique.
Sources :
[1]http://www.harmonia.cv/
[2] Plus de détails sur les événements live du Cap-Vert, à découvrir dans l'article La scène de la musique live au Cap-Vert.
[3]https://musique.rfi.fr/prix-decouvertes/inscription
[4] https://www.musicinafrica.net/fr/magazine/regardez-wanda-full-artistik-c...
[5] https://show-me.online/category/infos-musicales/
[6] https://www.scmusica.com/sobre-noacutes.html
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Les aperçus de Music In Africa fournissent des informations générales sur les scènes de musique dans les pays africains. Music In Africa comprend que l'information contenue dans certains de ces textes pourrait devenir dépassée avec le temps. Si vous souhaitez fournir des informations plus récentes ou des corrections à l'un de nos textes, veuillez nous contacter sur info@musicinafrica.net.
Édité par Lamine BA
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