L'Education musicale au Burkina Faso
Le Burkina Faso, et en particulier sa capitale, Ouagadougou, bénéficie d’une aura culturelle due en particulier à son dynamisme dans le cinéma avec le FESPACO, l’artisanat avec le SIAO. Pourtant, l’enseignement artistique et particulièrement dans le domaine de la musique fait cruellement défaut dans le secteur public, et quelques formations sont proposées par le secteur privé et associatif. Pourtant, Thomas Sankara avait initié en son temps l’éducation artistique populaire, qui a vite périclité et dont il ne subsiste rien aujourd’hui.
Contexte historique
L’enseignement classique, d’abord dispensé par les catholiques pendant la colonisation, a laissé place progressivement, à partir de l’Indépendance du pays en 1960, à l’enseignement public laïque. Les établissements privés catholiques ont longtemps été majoritaires tant dans le secteur primaire que secondaire, avec 60% des effectifs des enfants scolarisés, dont l’École Normale.
Dans ces établissements, l’éducation artistique faisait partie du programme obligatoire, et plusieurs enseignants y ont reçu une formation artistique en musique et dessin. À partir de février 1969, les écoles primaires catholiques ont été cédées à l’État, et les établissements secondaires d’enseignement général et technique conservés par les congrégations religieuses.
L’Université de Ouagadougou, créée en 1974, ne dispensait pas, pendant longtemps, de cours de musique. Il faudra attendre 1980, avec les cours du soir de l’URTNA (Union des Radios et Télévisions Nationales), jusqu’en 1991, et les cours de musique dispensés par la garde Républicaine à Ouagadougou pour que les aspirants musiciens puissent bénéficier de réelles formations, en dehors du circuit traditionnel et autodidacte dans lequel ils évoluaient.
De 1979 à 1981, l’École de Musique, rattachée à la direction de la Culture (Ministère de l’éducation et de la Culture), fondée par l’abbé Robert Ouedraogo, auteur, compositeur, maître de chorale, secondé par M. Toe Martin, organiste, a fonctionné tant bien que mal. Mais face à de récurrents problèmes de locaux et de moyens, elle a fini par fermer ses portes après seulement trois ans de fonctionnement.
En 1984, l’école de Musique et de Danse est fondée à Ouagadougou. Sa mission, populaire et révolutionnaire, est de former des musiciens amateurs. Les cours du soir et du week-end s’adressent plutôt à des travailleurs. Les enseignants y sont nationaux et étrangers, dont des Cubains, grâce à des accords de coopération culturelle que le Burkina entretenait avec Cuba jusqu’en 1992. Le 19 septembre 1985, l’Académie populaire des arts (musique et art plastique), née de la volonté du capitaine Thomas Sankara, donne une nouvelle impulsion à l’enseignement artistique.
L’éducation musicale y est d'abord donnée en marge des cours, avec la constitution de formations musicales telles que les Petits chanteurs au poing levé et les Colombes de la Révolution, avant d’ouvrir une section musique. En 1986, l’Académie populaire des Arts est déplacée au « Théâtre Populaire Désiré Bonogo », puis au mess des officiers pour revenir en 1988 au Théâtre Populaire. Son nom est changé pour celui d’École de Musique et de Danse (EMD) » , bien qu’elle comprenne également les arts plastiques. La formation de musique populaire n’y est plus de mise. La musique y est enseignée par la pratique instrumentale, et aucun cours de théorie n’est proposé.
En octobre 1985, un service d’enseignement artistique, à l’Institut Pédagogique du Burkina (IPB) est créé avec pour mission d’intégrer l’enseignement artistique dans les établissements primaires et secondaires, ce qui sera fait, à raison d’une heure par semaine, de 1986 à 1991.
Mais le nombre d’établissements secondaires publics qui en bénéficient va se raréfier au fil des ans. De quatre en 1987, ils passent à deux pour l’année scolaire 1988-1989, où de plus les cours d’éducation artistique ne sont dispensés qu’aux élèves volontaires, la plupart pour s’inscrire aux options facultatives du baccalauréat.
Les formateurs en musique, huit au départ, puis trois, étaient tous vacataires. Le 1er octobre 1989 le ministère de l'information et de la Culture organise un concours pour le recrutement de dix professeurs de musique. Les futurs professeurs bénéficient d’une bourse de l’État pendant les cinq années de formation à l’École de musique et de Danse désormais rattachée à la direction de la Formation Professionnelle et de la Recherche (DFPR).
Cette École a été tenue jusqu’en 1992 par les coopérants cubains en collaboration avec des nationaux pour l’enseignement des matières spécifiques (dictée mélodique et rythmique, solfège, chant, théorie musicale, harmonie, orchestration, audition, musique traditionnelle). Les matières générales étaient assurées par quelques nationaux.
Étaient aussi enseignés : le français, l’anglais, l’organologie, l’histoire de la musique, la sociologie de la musique, le droit d’auteur, la méthodologie et cours de pratique de la batterie, l’orgue, le saxophone, la guitare, les percussions (pour les instruments modernes), le balafon, le djembé (pour les instruments traditionnels). Des cours de danse prévus n’ont jamais été dispensés. À la fin de chaque année scolaire, un voyage d'études et d’échange culturel dans un pays voisin était programmé. Deux formations au Mali sur les instruments traditionnels (organologie) et une au Ghana sur l’expérience anglophone de la formation musicale ont ainsi été organisées.
En octobre 1991, le financement public destiné à l’enseignement artistique est supprimé du budget national, il ne fait dès lors plus partie du programme des écoles publiques. Certains établissements privés continuèrent à enseigner les arts, notamment dans les établissements catholiques, protestantes, etc.. avec une formation en solfège, chant et théorie musicale.
L’École de Musique et de Danse est devenue le Centre National de Formation Artistique et Culturelle (CENAFAC) en 1993. Grâce à des collaborations avec l’Association Professionnelle pour l’Éducation et la Formation à l’Étranger et l’Association Reem-Falao (promotion de la culture burkinabé), le programme, axé sur la formation des formateurs en théorie musicale, comprenait des cours de chant, d’harmonie et des ateliers de formation avec des experts internationaux.
Les élèves formés au professorat de musique depuis 1989 sont intégrés dans la fonction publique, comme agents du ministère de la communication et de la Culture, postes administratifs, en septembre 1994, alors que dans le même temps la réforme de l’éducation proposait l’introduction de la musique dans l’enseignement, proposition réitérée en (1997), lors des Journées de réflexion sur la musique.
L’université de Ouagadougou propose enfin un enseignement musical en 1997, à la Faculté des Sciences Humaines et Sociales (FLASHS), comprenant des notions de théorie musicale, le solfège, la composition et l’analyse des musiques burkinabés. Ces cours étaient assurés par Mr Sanou, actuel directeur adjoint de l’UFR-LAC, et l’abbé Joanny Sanon. Mr Roger Kabore donnait des cours d’ethnomusicologie aux étudiants d’Art et Communication, et à ceux du Centre International d’Etudes en Radio Rurale de Ouagadougou (CIERRO) devenu aujourd’hui, Union des Radios et Télévisions Nationales (URTNA), et le fit jusqu’en 2001.
En 2000, le CENAFAC rattaché à la direction de la Chorégraphie et de la Recherche Artistique (DCRA ) deviendra l’actuel INAFAC. Septembre 2003, INAFAC se transforme en une direction à part entière rattachée au Centre National du Spectacle et de l’Audiovisuel (CENASA). La formation en musique 2004-2005 a commencé en janvier 2005 avec une dizaine d’élèves inscrits en cours continus à l’INAFAC.
La nouvelle politique de l’École était au départ de supprimer les cours du soir pour les remplacer par les cours continus sanctionnés à l’issue de 3 années d’études par un CAP en musique. Les postulants devraient avoir le niveau Certificat d’Etudes Primaire Élémentaire (CEPE). Actuellement, le Burkina Faso a un taux brut de scolarisation de 70% en 2010 et d'alphabétisation de 40%. L’Université de Ouagadougou a crée une section à Bobo Dioulasso et une autre à Koudougou.
Formation
Établissements publics :
Il n’existe pas actuellement d’enseignement musical au niveau des établissements publics, que ce soit dans le secondaire ou dans le supérieur. Des cours décentralisés sont initiés dans certains lycées et collèges. L'enseignement y est plutôt basé sur la promotion des œuvres musicales, et de l’animation musicale (formations, ateliers). La philosophie qui guide les projets d’introduction de la musique dans le système éducatif est entre autres, le problème de la dynamique du patrimoine musical du Burkina et de la disparition des connaissances du passé. C’est l’un des buts que se sont fixé certaines organisations culturelles régionales et internationales comme l’UNESCO, l’ACCT, les Archives audiovisuelles (CNRST) du Burkina, l’ERPAMAO, le CERDOTOLA, etc.
L’Institut National de Formation Artistique et Culturelle (INAFAC)
L'Institut dispense des cours de musique, de danse et d'art plastique mais est démuni de moyens humains (un seul professeur titulaire), de matériel (pas de piano, insuffisance de salles…), le programme d’activité est réduit aux cours du soir, les effectifs sont en baisse constante.
Établissements privés et associatifs :
Dans la plupart des établissements religieux, et certains privés, la musique est une matière obligatoire à un certain niveau. Des formations sont proposées par des associations, avec des professeurs de musique.
La dernière trompette : École de musique uniquement, dirigée par Georges Zabsonre depuis 2001 avec l’appui financier du Programme de Soutien aux Initiatives Culturelles décentralisées ( PSIC). Le centre dispose de 4 orchestres pour accompagner des artistes. Dans cette école, il y a deux options : la formation individuelle (trois ans), pour l’apprentissage d’un instrument spécifique (guitare, batterie, piano, technique vocale), solfège et théorie musicale. Attestation délivrée par l’école. La formation collective, encadrement de groupes musicaux qui souhaitent avoir un meilleur niveau dans le domaine de l’orchestration.
Atelier Tamayé : École d’art audiovisuel et musique. Fondée par l’association Lutt'Opie en 2007. Des spectacles réunissant stagiaires et professeurs sont régulièrement programmés sur la scène des Ateliers Tamayé.
Ateliers en parallèle du festival « Jazz à Ouaga ». Master class
Ateliers organisés par les Directions Régionales de la Culture (DRC)
Conférences et ateliers ponctuellement organisés par certaines associations culturelles ou ONG.
Formations délivrées par compagnies de théâtre
ATB (Atelier Théâtre Burkinabé)
Ecole internationale de danse d’Irène Tassembedo : L'école donne des cours de musique, de percussions, et des master class.
À cela s’ajoutent certaines chorales chrétiennes, des préparations pour les compétitions Grand Prix National des Arts et des Lettres (GPNAL), de la Semaine Nationale de la Culture (SNC).
Source :
L’enseignement de la musique au Burkina Faso : état des lieux et enjeux dans le système éducatif.
Grégoire Kabore, Professeur de musique, Saxophoniste, Ingénieur de Recherche à l’Institut des Sciences des Sociétés (INSS) Centre National de Recherche scientifique et Technologique (CNRST) Burkina Faso http://portal.unesco.org/culture/fr/files/29984/11399308971kabore.htm/ka...
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