Rencontre avec Yekima, le slameur de Kinshasa
Yekima nous plonge dans les souvenirs de son enfance avec son nouveau single « Les Années Zaïre » paru il y a quelques jours. Il nous parle également de sa carrière et de l’album qu’il s’apprête à sortir dans les prochains mois. Interview.
Bonjour Yekima, quelle est ton actualité musicale ?
Bonjour Music in Africa, et merci pour l’interview. J’ai sorti le clip « Les Années Zaïre », un de mes deux derniers singles en date, qui était déjà disponible en version audio.
Autre actualité et la plus récente, c’est le Midem African Forum. L’équipe du Midem (Marché international de l'édition musicale) a clôturé sa tournée africaine au Congo-Brazzaville le 12 avril dernier où j’ai eu l’occasion de donner un concert devant plus de 2000 spectateurs parmi lesquels des professionnels et des représentants des labels tels qu’Universal Music, Sony Music, Bomayé Musik.
Vous avez créé l’Afroslam, comment ce style se distingue du slam tel que pratiqué par des artistes comme Abd Al Malik ou encore
Grand Corps Malade ?
Ces deux noms sont de grands modèles pour moi, cependant, j'ai choisi de me différencier d’eux. Avec l’Afroslam, Je puise mes rythmes dans ma culture afin de donner un parfum d’authenticité à mes textes.
Mes poèmes ne sont donc plus réservés qu’aux oreilles, mais aussi aux yeux et aux mouvements du corps. L’idée derrière est un slogan qui peut se traduire par « Make Slam Great Again ».
L’Afroslam pourrait donc être le chaînon manquant entre la musique africaine urbaine et l’oralité, nouvelle formule.
En octobre 2016, vous avez sorti un single « Je Te Présente Kinshasa», que représente cette ville pour vous ?
Kinshasa est une ville qui m’a vu naître et grandir. J’y ai tout vécu de ma vie. Une ville très hospitalière que parfois certains hôtes envoient à l’hôpital. On lui a gardé l’ambiance en retirant son élégance ; elle meurt le jour et vit la nuit
« Les années Zaïre ». Que vous rappelle cette période ?
Oh, plein de choses aussi belles que rebelles, surtout des films d’antan, des dessins animés, séries télévisées et leurs génériques, des chansons, des publicités et leur qualité homérique, des jeux d’enfance, la gastronomie, toute une vie, tout un vécu. Sans oublier n’est-ce pas le personnage du feu président Mobutu avec ses ombres et lumières. Vous savez, le cerveau ne recrache que ce dont on l’a nourri.
Sur ce morceau, j’apporte juste du bois pour faire du feu et réchauffer la nostalgie, après s’être révélé en guide touristique avec le single « Je te présente Kinshasa ».
Avec « Les Années Zaïre », j’offre là un nouvel outil pédagogique. Aussi instructif que les livres d’histoire, les musées nationaux ou les archives de la RTNC (la télévision nationale de la RDC).
Bien qu’en 4 minutes 11 secondes, moins que le temps qu’il a fallu au réalisateur belge Thierry Michel (célèbre pour son film « Mobutu, roi du Zaïre) pour raconter l’histoire du Zaïre, j’essaie de renseigner l’essentiel.
Cela répond aussi à un besoin, le besoin que notre histoire nous soit racontée par nous-même selon que l’on l’a vécue et ne pas toujours la laisser nous être racontée par les autres via des ouvrages ou des films étrangers, ce qui n’est pas mal au demeurant.
Vous êtes également humoriste, vous avez d’ailleurs participé à un festival d’humour à Kinshasa. Le slam rime-t-il avec l’humour ?
Mon slam, généralement oui. Et surtout quand c’est écrit à dessein pour être présenté sur une scène d’humour.
À l’école secondaire, j’écrivais déjà des pièces de théâtre. Et cela faisait beaucoup rire. J’ai évolué aussi dans une ou deux troupes de théâtre et j’y ai appris à être drôle, bon un peu... (rires).
Vous vous préparez à sortir un album probablement cette année. A quoi ressemble-t-il ?
C’est un projet entamé depuis 2014, et j’y présente mon style l’Afroslam. On y retrouve des musiques et des textes qui méritent qu’on s’y arrête. Il est fait pour tout public mais avec comme cible principale la jeunesse.
Il fait danser comme on n' a jamais vu ni connu avec du slam. Il est facile à écouter car les titres sont pour la plupart courts. Des thèmes abordés sont puisés dans le quotidien de tous, de sorte qu’on s’y retrouve vite. Il danse, il raconte, mais surtout il vit et vibre.
C’est un album qu’il faut obtenir à tout prix, un chef d’œuvre, je récuse toute fausse modestie.
Quels sont vos projets pour les cinq prochaines années ? Penses-tu par exemple à créer un festival ou à accompagner d’autres artistes qui
veulent faire du slam ?
Je compte pour les cinq prochaines années imposer mon style et inspirer les autres. Dans une société en manque de repères, je me veux un jalon, une référence un tant soit peu pour la jeunesse, celle de ma génération et celle à venir.
C’est aussi la sortie d’un deuxième album. Des concerts, des tournées. Bref, toute tribune grande ou petite qui me permettra de m’exprimer et présenter mon style.
Ça fait des années que je travaille sur le projet d’un vrai festival de Slam que je compte appeler Maloba (qui veut dire « parole » en lingala) afin d’y célébrer l’oralité dans ses diverses facettes.
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