La musique populaire à Maurice
Par Zack Maurice
À Maurice, les tubes internationaux cohabitent avec les succès de Bollywood tandis que le séga, le seggae et d’autres variantes de la musique locale rythment l’ambiance.
- Désiré François et le groupe Cassiya pendant un concert. Photo: ipreunion.com
Le séga côtoie les tubes internationaux et les hits de Bollywood dans le cœur des Mauriciens.
Faisant partie du folklore depuis les années 80 - à travers une initiative de la station nationale de radio et de télévision, la Mauritius Broadcasting Corporation - le traditionnel concours ‘Disques de l’Année’ est un rendez-vous incontournable quand retentissent les douze coups introduisant la nouvelle année au soir du 31 décembre.
Au plus fort du réveillon, de nombreux Mauriciens se tournent vers les quatre radios du pays qui dévoilent les titres élus comme “chansons de l’année”par leurs auditeurs respectifs. Les concours se passent dans trois catégories distinctes : chanson internationale, locale et Bollywood. C’est à ce niveau que l’on parvient à mieux repérer les préférences mauriciennes en matière de musique.
De Lean On à Di Pain Griye en passant par Baaton Ko Teri
En effet, entre les derniers tubes au sommet des classements sur la scène occidentale, les ségas ou autres créations d’artistes locaux et les grands succès commerciaux provenant de l’Inde, le cœur mauricien balance entre des rythmes disparates. Ainsi, sur Top FM, Lean On de Major Lazer et Dj Snake a été élue meilleure chanson occidentale en 2015. Dans la catégorie Bollywood, c’est Baaton Ko Teri du film All iswell qui a été sacrée meilleure chanson de 2015.
Au niveau de la musique locale, Friends, une création électro née d’une collaboration entre la chanteuse Laura Beg et le DJ Jimmy Gassel, a remporté le grand titre.
Sur Radio One et Radio Plus c’est du séga d’ambiance qui l’a emporté dans cette catégorie avec Di Pain Griye de Désiré François et Cassiya. L’une des grandes révélations de l’année a été le reggae créole Sirmonte proposé par le groupe The Prophecy.
Ainsi exposé aux grandes tendances internationales à travers les médias et l’internet, Maurice reste particulièrement sensible aux genres musicaux les plus en vogue dans le monde. En cette fin du mois d’août 2016, le classement hebdomadaire de Radio One indique que les chansons préférées des auditeurs sont les suivantes : Aloha de Møme ft. Jeann Merynn, Company de Justin Bieber, Perfect Strangers de Jonas Blue ft. JP Cooper ou encore Laisse-Les Kouma de Zaho F.
Il y a précisément 20 ans, les archives du magazine Scope précisaient les préférences locales comme étant les suivantes : Noire la Rivière Noire de Ravanne Sans Frontières dans la catégorie locale et Wanna Be des Spice Girls dans la catégorie internationale.
Le seggae
Si le Mauricien trouve ses préférences musicales dans le registre populaire ; le rock, blues, jazz et des musiques plus élitistes ont aussi leurs émules qui, tout en étant fervents, ne sont pas en si grand nombre. En témoignent les concerts et festivals autour de ces genres musicaux qui sont le plus souvent donnés dans des lieux favorisant une certaine intimité face à un public restreint.
Il en est de même pour la musique classique enseignée dans les conservatoires, mais pas pour autant popularisée auprès du grand public. Quant à la techno et à l’électro, elles restent très présentes dans les boîtes de nuit qui attirent davantage les jeunes.
En même temps, le reggae porté par Bob Marley et d’autres chanteurs anglophones a profondément marqué une génération. Alpha Blondy ou encore Tiken Jah Fakoly sont aussi très populaires dans le pays.
Depuis les années 90, le seggae, hybride entre le reggae et le séga, s’est installé dans le paysage comme un genre musical à part entière. Portée par des artistes comme Kaya et Ras Natty Baby, cette musique a eu un véritable impact culturel et social dans le pays. À travers des groupes comme les Otentikk Street Brothers, elle a aussi ouvert la voie à des expériences concluantes avec le mouvement hip hop.
La revalorisation du séga typique
Si le séga typique de Maurice a été reconnu par l’UNESCO, cette musique traditionnelle mauricienne construite autour de la ravanne, demande encore à être remise au goût du jour auprès du grand public d’où les initiatives récentes de quelques groupes et artistes comme Abaim, Lespri Ravann, Menwar, entre autres.
Depuis les années 80, le séga mauricien s’est modernisé à travers un tempo plus rapide avec l’ajout de la guitare, de la batterie, des claviers, etc.
Dans les années 90, le groupe Cassiya a porté le genre à un autre niveau avec une musique davantage enrichie et se séparant complètement du séga traditionnel. Cette nouvelle manière de faire a mené le groupe dans des tournées dans l’Océan Indien, en Afrique et en Europe et le genre s’est incrustré.
20 ans après, il connait toujours un vif succès comme l’a démontré le succès remporté par Di Pain Griye dans le classement des Disques de l’année 2015.
Colonisée par la France et ensuite par l’Angleterre, avant d’accéder à son indépendance, Maurice a hérité des goûts musicaux français et anglais. Ainsi, si les chansons anglaises sont très présentes dans le paysage musical, il en est de même pour la chanson française. Les connaisseurs restent accrochés aux grands classiques qu’il s’agisse de Piaf, de Brel, de Moustaki et autres, alors que la génération nouvelle connait très bien le répertoire des vedettes émergentes de la chanson française.
Il y a quelques mois, la nouvelle voix française Louane a joué à guichets fermés lors du concert donné au pays dans le cadre de la tournée organisée autour de la sortie de son album Chambre 12. Il y a déjà beaucoup d’enthousiasme autour des concerts que donneront Kendji Girac et Calogero en octobre. Et, c’est avec impatience que le public mauricien s’attend à retrouver Francis Cabrel en Live pour la cinquième fois en octobre toujours.
En 2016 les concerts de Frédéric François, d’Alain Souchon et de Laurent Voulzy ont été de grands événements à Maurice.
L’empreinte de Bollywood
A la fin du mois d’août, l’étoile montante de la chanson indienne, Palak Muchhal, a aussi joué à guichets fermés devant les nombreux fans qui l’ont appréciée pour Prem Ratan Dhan Payo, Chahun Main Ya Naa, Dekha Hazaro Dafaa, JabTum Chaho, Teri Meri Kahaan, entre autres. Ces chansons en hindoustani figurant dans les bandes originales de films ayant remporté de grands succès du côté de Mumbai, ont particulièrement la côte à Maurice où la culture indienne est intrinsèquement liée à celle des Mauriciens.
Enseignée dans les centres culturels, la musique traditionnelle de la Grande Péninsule bénéficie d’une certaine audience. Mais elle ne jouit pas de la même popularité que les musiques de films. Ainsi, les visites de playback singers, en vogue à Bollywood sont fréquentes dans le pays et leurs concerts sont généralement joués à guichets fermés.
Il en a été ainsi pour Sunidhi Chauhan ou encore pour le trio Shankar-Eshaan-Loy en 2016.
Au lendemain du concert de Francis Cabrel, Shafqat Amanat Ali, fils du légendaire chanteur pakistanais Ustad Amanat Ali Khan, sera devant le public mauricien avec quelques-uns des titres qui lui ont valu plusieurs récompenses en Inde.
Depuis quelques années, le paysage mauricien s’est aussi enrichi avec l’arrivée des musiques actuelles et nouvelles où les genres classiques sont enrichis à travers des expériences nouvelles. Cette musique mauricienne se fait le pont entre les continents. Les instruments traditionnels du pays rejoignent ceux des continents africains et asiatiques dans un mélange savoureux qui fait de plus en plus d’émules. L’auditoire est encore restreint, mais une nouvelle vague semble apparaître à l’horizon.
Source: Magazine culturel Scope: http://www.lemauricien.com/scope Radio One: http://www.r1.mu/ MBC (Mauritius Broadcasting Corporation): http://mbc.intnet.mu/ Top FM: www.topfmradio.com/
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