Baya Ciamala : « Nous développons un modèle adapté aux besoins des artistes »
Baziks, l’application de streaming musical lancée en 2017 s'apprête à monétiser ses services. Baya Ciamala, son fondateur, revient sur le récent développement et les perspectives d’avenir de la plateforme d'écoute musicale. Music in Africa l’a rencontré.
C'est depuis près de 3 ans que l’application de streaming musical Baziks a été lancée, comment évaluez-vous son utilisation par les artistes et leurs fans ?
Ça fait plus précisément 2 ans et 5 mois que nous avons lancé Baziks. Le premier du genre en RDC et peut être même en Afrique francophone. Cela n’a pas été de tout repos et ça n’a pas non plus été facile. Sans budget marketing nous avons malgré tout franchi le cap de 12 500 abonnés. Le côté positif, c’est aussi le fait que cela a contribué à notre expérience. Ça nous a permis de savoir où aller, quoi faire et ne pas faire. Nous venons de lancer une 3e version de l’application Baziks disponible sur Google Play Store et uniquement en RDC. Il s’agit d’une version qui nous permet de monétiser le service, car la précédente était une version d'essai qui devait nous permettre de nous faire une petite place sur le marché.
Grâce à un accord avec la SOCODA (la société congolaise des droits d'auteur) que nous avions déjà obtenu nous proposons progressivement un catalogue avoisinant le million de titres d’une part et d’autre part nous avons déjà connecté M-pesa à notre service, ce qui fait que 1 900 000 utilisateurs de ce système de paiement mobile peuvent payer un abonnement à Baziks. Nous nous attelons à rajouter d’autres systèmes de paiement mobile comme Orange Money et Airtel Money pour couvrir un plus large public.
Tout le monde n’attendait que cette nouvelle version de Baziks et les retours que nous avons de la part de nos utilisateurs sont plutôt positifs. Maintenant que cette étape est franchie, nous pouvons affirmer avec assurance que nous passons à une étape décisive pour notre croissance.
Parlant de la nouvelle version de Baziks, à quoi, les utilisateurs devraient-ils s’attendre exactement ?
En préparant la nouvelle version, l’idée était de libérer le potentiel de Baziks. Après avoir introduit le streaming au pays et en Afrique francophone en apportant une nouvelle expérience sur l’écoute musicale, il était logique pour nous d’évoluer. Voilà pourquoi nous disons que la nouvelle version de Baziks permet maintenant de vivre une expérience musicale supérieure. Et ce n’est pas du bluff puisque nos utilisateurs peuvent sentir le coté user friendly dans la prise en main de l’application.
Baziks se présente sous un nouveau design avec des nouvelles fonctionnalités offrant une meilleure expérience de l’application avec des fonctionnalités telle que : la création de playlists selon ses gouts. Nous avons amélioré le fameux follow pour ceux qui veulent suivre leurs artistes et rester informé sur leur actualité. Cette fonctionnalité, je précise vise à moyen terme le renforcement de l’interaction artiste-fans. Il est possible de déployer son lecteur, et même de liker (aimer) un morceau et qui va automatiquement se retrouver dans sa liste de chansons favorites que l’on peut évidemment placer dans ses playlists selon ses gouts. Cette nouvelle version de Baziks dispose d’un espace de paramétrage plus amélioré avec possibilité de retrouver ses playlists, de gérer son profil, de changer de langue (français ou anglais) et même de changer de thèmes ou sélectionner son type de notification.
Vous entamez prochainement la monétisation de vos services. Comment comptez-vous facturer vos utilisateurs ? Quels sont les avantages que présentent les abonnements premium (service payant) ?
En fait, le premium va donner la possibilité d’écouter la musique hors ligne rien que par son abonnement. Nous proposerons aussi des bonus selon les délais d’usage pour faire profiter nos utilisateurs de cette expérience musicale supérieure. Nous communiquerons sur l’offre premium au moment opportun. Au stade actuel, nous poussons d’abord le freemium, il s’agit d’une offre d’écoute gratuite et sans option mais ce sont les annonceurs qui sponsorisent l’écoute pour les utilisateurs de Baziks.
Notre stratégie ici et de permettre à ceux qui n’ont pas les moyens de profiter de notre service tout en dégageant du revenu. Nous jouons sur l’équilibre : recrutement continu contre la rentabilité.
Le chiffre d'affaires de la publicité en ligne en Europe par exemple a atteint 228,44 milliards de dollars en 2017, une croissance de 19,1% par rapport à l'année 2016 (chiffres fournis par eMarketer). Selon les experts si jamais cette croissance devait se ralentir dans les années à venir, la croissance tomberait à 9,9 %. Nous constatons que le digital a pris une place nettement plus importante dans le mix marketing.
Chez nous en RDC le marché de la publicité et de la communication pesait plus de cinquante millions de dollars en 2016. Baziks a comme objectif de faire un chiffre d’affaire de près de 1 341 000 dollars américains dans les 5 ans, si ce n’est pas plus tôt, en grignotant notamment sur ce marché. Le challenge est de convaincre les annonceurs. Ça nécessite beaucoup ténacité, mais le potentiel est tout de même énorme au pays et ailleurs.
La question sur les droits d’auteur revient souvent quand il faut rémunérer les artistes. Vous dites avoir un accord avec la SOCODA pour exploiter son catalogue. Comment rétribuer les artistes qui n’ont pas intégré cette société de gestion collective ?
Sur ce point, je pense que le plus important, c’est d’abord de protéger les œuvres et leurs auteurs afin de limiter tout risque de plagiat comme on l’a vu entre Michael Jackson et Manu Dibango à l’époque ou récemment Shakira avec le groupe camerounais Zangalewa, et même Pepe Kalé. Si la protection de l’œuvre n’est pas optimale, nos artistes verront d’autres s’enrichir grâce à leurs créations pendant qu’eux meurent pauvres. En suite pour la rétribution des droits, nous le faisons directement auprès de l’unique société de gestion collective des droits d’auteur du pays à ce jour qui est la SOCODA. Sur ce, nous encourageons les artistes qui ne sont pas affiliés à cette société de le faire.
Nous réfléchissons aussi sur la création d’une structure indépendante dont le modèle est à définir et ou les artistes seront seuls à décider de ce qu’il faut faire de l’équivalent des redevances de leurs droits. Nous nous sommes également rapprochés de la SACEM (société de gestion des droits d’auteur française). Via cette société bien outillée, on peut aussi envisager des solutions à l’avantage des artistes.
Outre l'application de streaming musical, vous comptez également monter une maison de disque, quelle sera sa particularité et comment comptez-vous signer les artistes ?
Oui, c’est une évolution du programme Baziks Accelerator que nous voulions mettre en place à l’époque. Maintenant que nous disposons de notre propre studio d’enregistrement pour nos propres créations, l’idée a évoluée. Nous développons actuellement un modèle à la Netflix (une des principales plateformes streaming de vidéos à la demande) mais où l’artiste sera au centre puisque c’est lui le créateur. Nous communiquerons à ce sujet avec force détails au lancement dans les prochaines semaines. On espère pouvoir accompagner l’encadrement du marché tout en aidant les artistes à créer à leur tour, leurs propres labels.
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