Oumar Ndao : c’était un esprit inspiré !
Par Amadou Lamine Sall
Quand on prend subitement connaissance d’une telle perte, d’une telle épreuve, on s’affaisse, on se tait, on ne pense plus, on n’arrive même pas à pleurer, on pense qu’il est temps de s’arrêter, que cela ne sert à rien de courir. On se sent si vain, si vaincu. On se demande ce qu’il faut vraiment faire maintenant que tout va vite, si vite. Seule la mort est démocratique. Elle ne fait aucune différence entre les tendresses, les fonctions, les privilèges, les urgences, les devoirs, les projets, les rêves, les attentes.
Devant la mort, avoir dans sa vie obéie au bien et cru obstinément en Dieu, restent notre seul salut !
Ce que l’on retient d’Oumar Ndao sans hésiter, c’est son bel esprit avec ce sens de l’humour inégalable. C’est avec lui que j’ai eu encore cette certitude que les grands hommes sont les plus humbles. Oumar était si simple, si ouvert, si taquin. Il ne semblait rien prendre au sérieux. Il avait fait de sa vie, quelque part, une sorte de bateau ivre. L’artiste en lui supplantait le professeur. Mais quel professeur! Quel brillant esprit! Quel raffinement dans l’exercice du verbe ! Quelle pédagogie et quelle profonde prise de parole ! Quelle étonnante culture servie par un humble homme toujours lumineux ! J’imaginais mal voir Oumar en costume cravate. Ce n’était pas cet intellectuel là. Il nous avait habitués à un habillement dépouillé, sobre quelque que soit le lieu. C’était cela le reflet de son âme !
Son jugement était toujours presque hilarant, jusque dans les sujets les plus ténus. Il avait le sens du raccourci et quel raccourci ! Le respect, oui c’est le respect et l’irrésistible attachement qui vous poussaient vers Oumar. Il inspirait la tranquillité. Rien ne semblait pouvoir le troubler. Je l’aimais et je l’admirais car il apparaissait comme une oasis dans un monde reptilien, fiévreux, crispé, haineux, hypocrite, mensonger. Sérénité, oui Oumar était la sérénité même.
Cette force était sa force. Une belle et fertile intelligence vient de nous quitter. Qui ne rêverait pas d’un tel conseiller en culture? Praticien et théoricien à la fois, il pratiquait l’écriture comme il pratiquait la maïeutique. Oumar était tout simplement fabuleux ! Pourquoi mon Dieu nous prendre si tôt de tels êtres ? Nous avions encore tellement besoin d’Oumar ! Khalifa SALL le maire de Dakar dont il était le plus fin des collaborateurs, doit être bien dévasté. Khalifa m’avait d’ailleurs promis de partager un de ces matins le petit déjeuner avec Oumar pour faire le point sur nos projets culturels et la place de la ville dans la culture. Nous étions ensemble sur un vol de la Royal Air-Maroc, moi vers Fès lui en partance pour l’Arabie Saoudite.
Oumar nous manquera beaucoup. Il nous a appris comment vivre, comment aimer, comment regagner la lumière à chaque fois qu’elle nous manque. Il restera pour longtemps une figure de notre horizon.
Dieu l’aime. Il nous le gardera. Soyons dignes de son héritage.
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