Droits d'auteur, droits voisins et redevance au Sénégal
Du point de vue juridique, il est important de voir comment assurer le contrôle d’une œuvre qui est séparée de son créateur et se trouve entre les mains des exploitants (producteurs, diffuseurs, distributeurs, consommateurs).
Seul le droit est censé établir un lien permanent entre l’auteur et son œuvre, entre le créateur et sa création, entre le producteur et son enregistrement, et entre l’artiste et son produit. C’est ce qui justifie l’internationalisation du droit des auteurs à la fin du XIXe siècle en Europe lors de la convention de Berne en 1886.
À l’instar de toute la communauté internationale, conformément à la convention de Berne et aux respects de ses engagements internationaux, ce n’est que le 04 décembre 1973 que les droits d’auteur sénégalais sont reconnus par la loi 73-52 après la création du BSDA (Bureau Sénégalais des droits d’Auteur) par la loi 72-40 du 26 mai 1972. En effet, le BSDA, société parapublique, ne gérait que les droits d’auteurs durant des dizaines d’années et ne prenait pas aussi en compte la rémunération de la copie privée.
C’est pourquoi « La multiplication des copies permise par les lecteurs de cassettes, puis par les magnétoscopes et désormais par une gamme étendue d'appareils et de supports numériques qui se sont substitués aux matériels analogiques a considérablement accru le manque à gagner des auteurs et des autres ayants droit »[1]
Or à côté de ces auteurs, il existe des interprètes, des producteurs et les radiodiffusions. Les droits de ces derniers ne seront reconnus et pris en compte que plus tard par la loi 2008 -09 du 25 janvier 2008. Heureusement, au fil du temps, on constate que le cadre juridique n’a pas tenu compte de l’évolution de la technologie, et des droits voisins.
C’est pourquoi, ce texte juridique semble désuet tout en présentant des limites[2] . De prime abord, il n’est pas conforme aux traités internationaux comme ADPIC (Accords ayant pour projet la promotion et la protection des droits de la propriété intellectuelle), puis son mode de rémunération est caduque, et enfin elle est inefficace en matière de production, vu l’évolution de la technologie et l’apparition de nouvelles formes de production[3].
Tout cela a suscité, voire engendré la mise en place d’un autre projet de loi sur les droits d’auteur et les droits voisins conformément à la convention de Rome du 26 octobre 1961 relatif à la protection des artistes interprètes, des producteurs des phonographes (ratifiée le 14 janvier 1988) dès le début des années 2000 sous l’initiative du ministère de la Culture.
Après cela, il y apparaît la mise en place des politiques de réglementation par des textes juridiques comme la loi 2008 - 09 du 25 janvier 2009 abrogeant celle de 1973 (relative aux droits d’auteur), pour encadrer, réguler, organiser soutenir ce secteur et être en conformité avec les traités internationaux.
Cette législation arrive tardivement, une cinquantaine d’années après la convention de Rome, mais aussi elle peinait à se mettre en œuvre. Force est de reconnaître que cette loi sur les droits d’auteurs et droits voisins (loi 2008-09 du 25 janvier 2008) est portée par les acteurs de la culture.
C’est le résultat d'une lutte de longue haleine, fait d’engagement et de militantisme des acteurs de toutes les corporations du secteur de la culture sus d’une bonne volonté politique de l’État. Pour preuve, depuis 2008, il a fallu huit ans de travail encore, pour que le BSDA s’efface au profit de la SODAV (Sénégalaise des droits d’auteur et des voisins) en octobre 2016.
La mise en application de cette loi a mis en place la SODAV, une société de droit privé consacrant de nouveaux droits, que sont les droits voisins en sus des droits d’auteur que gérait le BSDA cette loi est porteuse aussi de deux nouveaux droits : les droits voisins et le droit de la rémunération d’une copie privée.
Ces nouveaux droits seront gérés au sein de la SODAV, par deux commissions administratives à savoir, la rémunération Équitable et la copie Privée. Le droit de la rémunération de la copie privée fait référence à une taxe forfaitaire qui devrait être appliquée à tous les supports susceptibles d’enregistrer des sons et des images en fonction de la durée et de la capacité qu’il permet de son usage.
Cela pourrait sans nul doute, contribuer également à une « rémunération juste et équitable visant à compenser financièrement le préjudice subi par les auteurs et les titulaires de droits voisins »[4]
Selon Aly Bathily « En moins de trois ans, 808 millions de francs CFA ont été répartis. En 2016 à la dernière répartition du BSDA, le montant réparti s’élevait à 68 millions de francs CFA. en 2017, on était à 273 millions FCFA, en 2018, on est à presque 400 millions (393 millions de FCFA) »,[5] « une nette augmentation aussi bien en matière de perception qu’en matière de collecte des droits est notée ».
Il poursuit en ces termes « Au regard de tout ce processus, force est de reconnaître que des efforts importants sont en train d’être réalisé dans le gestion des droits d’auteur et des droits voisins même si le chemin est épineux. »[6]
Références :
[1] - https://www.seneplus.com/opinions/les-droits-dauteur-lere-du-numerique
[2] -Saliou Ndour et al., Industrie musicale au Sénégal : essai d’analyse, Dakar, CODESRIA, 2008, p.178
[3] -idem.
[4]-Les TIC une chance pour l’Afrique in https://www.seneplus.com/opinions/les-droits-dauteur-lere-du-numerique
[5] -aps.sn/.../les-35-de-frais-de-gestion-preleves-par-la-sodav-correspondant-a
[6] - - Les 35 % de frais de gestion prélevés par la SODAV ... – aps.sn/.../les-35-de-frais-de-gestion-preleves-par-la-sodavcorrespondant-a
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