Assane Kane, disquaire indépendant : « J’ai peur que ma boutique disparaisse, mon métier avec »
Le Record Store Day, célébration mondiale du disque, à l’instar de la plupart des évènements culturels de cette année, a été annulé. Cette fête du disque et des disquaires indépendants, initiée il y a dix ans, se tient tous les mois d’avril dans plusieurs pays à travers le monde.
Le Disquaire Day est méconnu sur le continent, particulièrement au Sénégal, où cette filière ne tient que grâce à quelques rares résistants comme Assane Kane, l’un des derniers disquaires indépendants du pays, victime en ce moment, de l’impact économique du Covid-19.
Avec la crise sanitaire qui a occasionné la fermeture de l’Institut Français de Dakar au sein duquel se trouvait sa boutique, Assane a cessé toute activité. C’est un homme inquiet de voir son enseigne et son métier totalement disparaître, que nous avons eu au bout du fil hier. Découvrez notre entretien.
Bonjour Assane, tu es l'un des derniers disquaires au Sénégal, parle nous d'abord un peu de ton enseigne...
Bonjour Lamine, Torobee distribution est une boutique de disques qui vend des albums authentiques, des vinyles, des CDs et cassettes rares d'artistes d’hier et d’aujourd’hui.
Elle vend également quelques articles et accessoires liés au monde artistique.
Avec la crise sanitaire du Covid et la fermeture de l’Institut français au sein duquel se trouve ta boutique, comment ça se passe pour toi ?
J'ai été obligé de fermer la boutique avec la clôture de l’Institut Français, depuis quelques mois, je n'ai plus aucune rentrée d'argent, plus aucun revenu et les factures ne cessent de s'accumuler ; j'ai la location à payer par exemple, je suis gravement affecté.
Qui sont tes fournisseurs ? Est-ce que tu continues à recevoir des disques à vendre par livraison par exemple ?
Mes fournisseurs sont d’abord la maison Syllart Records avec Binetou, la fille d'Ibrahima Sylla, Universal Music, Lusafrica, Contre-Jour en Belgique et Teranga Beat d'Adams choice.
Il y a aussi des artistes qui jouent à l’Institut Français ou pas, qui déposent leurs œuvres à la boutique. Actuellement, je ne reçois plus de disque, j'ai essayé de travailler par livraison mais trouver des clients en ce temps de crise est vraiment très compliqué.
Tu as une idée du manque à gagner subi avec cette fermeture forcée ?
Oui, j'ai une idée du chiffre d’affaires que je réalise en temps normal, avec les événements artistiques aussi. Je peux vous dire que le manque à gagner est important pour moi.
Tu n’as pas peur que l’activité disparaisse totalement avec la crise du Covid-19 ?
J'ai vraiment peur de perdre mon gagne-pain, mais au-delà, j'ai peur que l'activité elle-même disparaisse. Le métier de disquaire pourrait définitivement disparaître. Ce sera difficile pour nous de nous adapter.
As-tu entrepris des démarches auprès du ministère de la culture ou des organismes professionnels pour être considéré à juste titre comme un impacté et bénéficier d’une aide ?
Non, je n’ai pas fait de démarches auprès des ces institutions, mais je suis sérieusement impacté et j’ai besoin de leur aide pour survivre à cette crise.
Pourquoi tu ne fais pas les démarches nécessaires ?
Je ne savais pas qu’il y’avait des démarches à faire. Mais maintenant que je suis informé, je vais entamer des actions dans ce sens...
Un dernier message ?
J'exprime ma solidarité à tous les musiciens en ce temps difficile. J'espère que le secteur sera écouté et entendu, et que personne ne sera laissé en rade.
Les disquaires font partie de la chaîne de valeurs de la scène musicale, ils font partie des impactés, il ne faut pas qu'on l'oublie. Je suis persuadé qu'ensemble, nous pouvons nous relever de ce coup dur.
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