Mustaf, ou les voies du Seigneur
La première fois que j’ai rencontré Mustaf, j’ai été étonné : son teint très noir qui brillait sous le chaud soleil du mois d’Avril, ses tresses à la Coolio, son habit de Baye Fall, tout en lui était détonait. Et plus bizarre encore, après les salamecs d’usage. il n’a plus ouvert la bouche. Il ne paraissait pas concerné par ce qu’on disait. il semblait ailleurs... profondément absorbé dans ses pensées.
Dés cet instant il m’a intrigué, celui qu’on me présentait comme un artiste très prometteur, semblait aux antipodes de l’archétype de l’artiste sénégalais que je connaissais. Comme j’étais moi-même un peu réservé, je n’ai pas cherché à approfondir ce premier contact des plus froids. J’étais alors, loin de me douter qu’il serait un des mes plus grands amis et plus proches collaborateurs. Et que nous passerions cinq années de nuit blanches, à parler de musique, de religion, et de futur artistique très radieux. Ainsi je découvris petit à petit cette personnalité étonnante et généreuse, appris à l’apprécier, et essaya parfois mais en vain, de le protéger de ce que moi j’appelais ses « délires » et que lui appelait ses « visions ».
Mais en définitive, c’est ce qui me permet aujourd’hui de brosser un portrait très fidèle de Mouhamadou Moustapha Mbaye alias Mustaf, né en 1980 dans la région de Dakar. Mustaf a quitté l’école en classe de troisième secondaire, Il maitrise parfaitement le Coran et récite par cœur des centaines de hadiths, fervent disciple de Cheikh Ahmadou Bamba, il est ce qu’on appelle un « mouride sadikh ».
La voix de Mustaf est chaude, parfois caverneuse et dégage ce je ne sais quoi de sensuel, grave et triste à la fois. Sa parfaite technique fait de Mustaf la star des mélomanes. Il jouit d’un respect énorme auprès du public underground. Mustaf, est un des ces êtres au mysticisme très prononcé, malgré le milieu dans lequel il baigne quotidiennement : celui de show-bizness. Ce mysticisme est tel que Mustaf fait des rêves des plus bizarres tous les soirs ou presque. Au début, je souriais avec scepticisme quand il me faisait part de ses rêves et décortiquait avec foi les messages qui y seraient liés selon lui.
Mais au fur et à mesure je pris conscience de ce que cela représentait pour lui. J'entrevu la part de vérité dans ses propos, appris à respecter et à prendre au sérieux ce qu’il me racontait. Voici comment ? Un soir, comme tous les soirs en ces temps là, nous écoutions de la bonne zik et sirotions tranquillement un chaud café touba, attendant l’aube pour nous séparer. Mustaf m’expliqua que depuis trois jours il avait des visions terrifiantes qui selon lui était annonciatrices de malheur dans notre plus proche voisinage. Quelle ne fut ma surprise, le lendemain matin quand j’entendis des pleurs dans la maison voisine et qu’on m’annonça la mort du chef de quartier. À Quatorze heures après la prière de Tisbar Mustaf et moi assistâmes à l’enterrement du chef de quartier; il n’arrêtait pas de murmurer : « J’avais vu tout ça » comme pour se convaincre lui-même.
Mustaf l’artiste est toaster, rappeur, chanteur. Il est très éclectique, même dans ses goûts. Underground s’il en est, Mustaf n’en demeure pas moins un artiste qui compte déjà quelques beaux succès à son tableau : Lauréat du concours « Chansons de jeunes contre le Sida » en 2004 avec son groupe Baat Sen Funé, il remportera ce concours deux ans plu tard en prenant la première place avec en duo la jeune Bijou Aidara, grâce à une chanson écrite et composée par lui. Il a aussi participé à plusieurs films documentaire. Il fut aussi, durant deux ans, Ambassadeur pour le bien être de l’Enfant Africain d’une ONG internationale basée à Dakar.
Il compte plusieurs collaborations avec des artistes internationaux, il est aussi un des rares artistes dit underground à participé à des festivals à l’étranger : Danemark, Italie, Belgique, Autiche, etc. L'ambition de ce jeune loup est grande, très grande, et dans ses « visions » il se voit maître du monde graçe à sa voix, d’ailleurs tous ses voyages, il les avait prédit. Jamais pessimiste, Mustaf aime à répéter cette citation que nous avions appris d’un vieux marabout : « Il n’y qu’une seule place honorable et disponible dans la vie : La premiére place ». Une manière pour lui de garder le cap vers son destin… Un destin hors normes.
Découvrez la musique de Mustaf
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