RDC : comment les artistes de gospel vivent de leur musique ?
Je trouve qu’il est important de s’intéresser à la musique gospel. Elle prend de l’ampleur en Afrique (et en RDC), les gens l’apprécient, l’écoutent et achètent des CDs. Ses artistes donnent des concerts, signent des contrats et vivent parfois mieux que les autres musiciens. Comment les chanteurs de gospel vivent de leur métier ? Comment gagnent-ils de l'argent ? Des réponses dans cet article.
Le marché de la musique gospel
Il existe un marché pour le gospel en RDC. Cependant, comme d’autres genres musicaux, il est moins structuré. Il n’y a pas assez des producteurs, ils se comptent sur les doigts de la main. Kin Express dirigé par Antoine Katoto, qui a notamment produit Alain Moloto, Matou Samuel, et Aimé Nkanu, est le seul grand producteur de musique gospel.
Pour ne pas dépendre d'une maison de disque, certains artistes ont crée leur propre label, c’est le cas de Charles Mombaya (disparu il y a quelques années) avec Asifiwe Music et Mike Kalembay, avec son Shekina Music. Dena Mwana, la jeune chanteuse de gospel, produit ses disques à travers Happy People Music, label dirigé par Michel Mutahali, son mari (qui est aussi son manager).
On constate également, l’émergence des chaînes de télévisions dédiées à la musique gospel. LMTV, une chaîne de télévision panafricaine, installée en Côte d’Ivoire, consacre une grande partie de sa programmation à la musique gospel. Gospel TV (qui diffuse sur l'un des bouquets du français Canal+), Trace Gospel et ST Gospel (du chinois Startimes), sont parmi les médias qui proposent de la musique gospel.
La vente de CDs
Les artistes du gospel en RDC (comme dans le reste de l’Afrique) ne bénéficient d’aucun statut particulier par rapport à leurs collègues. Ils doivent vendre et prester sur scène pour gagner de l’argent.
« Les musiciens de gospel les plus connus signent des contrats et empochent pas mal d'argent mais petit à petit, les artistes préfèrent se pencher sur la vente en ligne et le streaming », affirme Michel Ngongo, enseignant à l'Institut National des Arts (Kinshasa, RDC). Autrefois, les artistes s’appuyaient sur les distributeurs pour vendre. Mais la donne a changé. Grâce à internet, les musiciens proposent leur musique sur les plateformes de streaming (d’écoute en ligne) et des sites web de téléchargement légal.
Certains artistes privilégient les ventes à travers un réseau de sympathisants, qu’on appelle communément des « fans club ». Un observateur de la scène musicale congolaise, rapporte qu’un jeune chanteur vend ses albums à travers un groupe de soutien, composé essentiellement d’étudiants. « Si vous avez un fan club de 10.000 étudiants dans les campus universitaires rien qu’à Kinshasa et si chacun achète un CD à 5 USD, faites le calcul, vous voyez que l’artiste peut facilement gagner de l’argent à travers ce canal de vente ».
Néanmoins, ils peuvent compter sur les églises évangéliques, qui soutiennent des artistes en proposant leur musique aux chrétiens qui peuvent acheter un album deux ou trois fois plus cher. J’ai moi-même vu pendant un culte évangélique, comment un lot important de CD a été vendu en quelques minutes, juste parce que le pasteur a fait un appel et que les chrétiens y ont répondu favorablement.
Les concerts et autres prestations
« Pour le moment, à plus de 80%, les artistes vivent des prestations (concerts, invitations des églises, etc.) », avance Michel Ngongo. Les concerts sont l’une des principales sources de revenu. Ces spectacles peuvent être financés par un sponsor ou un partenaire.
D’autre part , les églises jouent un rôle de premier plan dans la promotion de la musique gospel. Les musiciens sont souvent invités aux cultes, campagnes d’évangélisation, conventions, etc. Ils reçoivent, à cet effet, un cachet.
La rémunération dépend d’une église à une autre. « Le cachet varie selon la notoriété de l’artiste, il se situe entre 200 et 500 USD », assure un employé de bureau d’une église évangélique à Kinshasa. « Il arrive parfois qu'on prenne en charge les frais de transport avant toute prestation », ajoute-il.
Quand ils sont invités à prester dans une campagne d’évangélisation, les artistes en profitent pour vendre quelques CDs. Les vidéos et les chansons interprétées pendant les spectacles sont également commercialisées.
Les chanteurs de gospel rivalisent avec leurs collègues leur collègue de la musique dite « profane ou mondaine » pour des prestations à l’étranger. En mai dernier, Mike Kalambay était au Palais de la culture d'Abidjan (Côte d’Ivoire). En décembre 2015, Dena Mwana a partagé la scène avec des grands artistes américains (Donnie McClurkin, Nicole C.Mullen, Israël Houghton) au « Gospel Light 12 », concert organisé au Stade Félix-Houphouët-Boigny, dans la capitale ivoirienne.
Je crois, et c’est de mon avis, que le gospel prend son envol. Le professionnalisme et la qualité d’œuvres proposées par ses artistes sont prouvés. Il revient à chacun de trouver un modèle économique viable, des moyens qui leur permettront de gagner leur vie. Quand je vois certains rouler carrosse dans les rues de la capitale congolaise, je me dis que la musique gospel paye mieux qu’avant.
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