La musique saharienne d’Algérie
La musique saharienne nous remémore l’époque des caravanes qui traversaient le désert d’est en ouest et inversement pour un commerce transfrontalier. De la même manière, la musique du Sahara est portée par le vent et le sable du désert et ne connaît point de frontières. Dix États se partagent le Sahara : l'Algérie, la Tunisie, le Maroc, la Libye, et l'Égypte, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Tchad, le Soudan. Cette musique du Sahara va de l’Atlantique à la Mer Rouge et elle est caractéristique du Grand Sud pour tous les pays d’Afrique du Nord. En Algérie, la musique du Sahara se joue sur des instruments communs aux régions du Sahel et s’allie à la poésie comme dans les célèbres chants du Hoggar dont on a retrouvé la trace au XIXème siècle.
Par Rita Stirn
Instruments traditionnels de la musique saharienne
La musique saharienne a ses solistes qui jouent en virtuose du guembri, un instrument à cordes de la musique gnaoua appelé aussi hajhouj lorsqu’il est de plus grande taille. Il est fait d’un manche en bois et d’une peau de chameau tendue pour caisse de résonnance et ses trois cordes sont en boyaux de chèvre.
D’autres instrumentistes pratiquent l’imzad, un instrument de la famille des vielles, une corde en boyau épais joué avec un archet rustique, il est joué uniquement par les femmes. Le rythme est soutenu par le tbal, un tambour joué avec deux baguettes et le bendir, un instrument qui ressemble à un tambourin.
Pour la rythmique, il faut ajouter les krakab, quatre cymbales à main, deux de chaque côté, reliées par une ficelle. Comme dans tous les déserts, on retrouve la flûte, un instrument traditionnel au Sahara, appelée ney, une flûte à embouchure en roseau.
La musique des Gnaouas du Sahara d’Algérie
Les Gnaouas sont à la croisée des cultures de l’Afrique, de la tradition berbère (amazigh) et de l’apport arabo-musulman. Venus comme esclaves de la région sahélo-saharienne, la confrérie des gnaouas s’est développée dans tous les pays du Maghreb. On leur attribue un pouvoir de guérison et des pratiques ésotériques.
« Symboliquement, on pourrait dire que la musique gnâwi représente une sorte d’union entre le ciel et la terre, entre le monde visible et le monde invisible. C’est une musique qui dialogue avec les esprits en usant d’un langage fait de sonorités musicales, d’invocations, d’encens, de danses et de couleurs » (Abderrahmane MOUSSAOUI, Anthropologue).
La danse des Gnaouas se caractérise par des mouvements de rotation de la tête, des sauts en hauteur sans élan et des mouvements répétitifs qui mènent à la transe et à l’extase. Cette musique est aussi appelée diwan dans le sud-ouest algérien.
La hadra, une musique de transe
C’est une musique jouée et chantée exclusivement par des femmes, à l’instar du groupe Lemma de Béchar, aux portes du Sahara. Sa soliste au guembri, Hasna El Bechariya est la Maîtresse de Cérémonie et les autres membres du groupe, toutes percussionnistes répondent à son chant et à son jeu en soliste au guembri, soit par la voix, soit par le battement des mains en s’accompagnant de leurs leurs instruments.
Ce groupe réuni par la chanteuse Souad Asla a franchi les frontières de l’Algérie et s’est produit lors du festival de la Hadra à Essaouira en 2015 et au Festival de World Music (WOMEX) à Helsinki en 2019. En quelques années, ce groupe féminin, s’est fait connaître sur les scènes internationales et fait rayonner le patrimoine musical saharien et algérien. L’anthropologue Abderramane Moussaoui nous explique le sens du mot lemma : «Procéder à une lemma autour d’un café, d’un thé, d’un repas, d’une supplique ou de tout autre évènement heureux ou malheureux, c’est se réunir et s’unir pour conjurer le sort qui risque de porter préjudice à l’être ensemble »
Souad Asla dit dans sa présentation d’un concert que les musiciennes de Lemma sont sa famille et que le jour où elles disparaitront, elle sera à jamais orpheline. Elles sont les gardiennes d’une tradition séculaire. Sur scène leurs longues robes colorées complètent le tableau musical. Dans leur répertoire zaffani, le sacré et le profane ainsi que le genre, se confondent. Lemma offre un spectacle authentique et original.
La musique des oasis sahariennes du Gourara
Cette musique se caractérise par un chant polyphonique l’ahellil et le tagerrabt de la tradition amazighe des Zénètes du Gourara. Ce dernier est chanté exclusivement par des femmes. Quant à l’ahellil, il se pratique entre autres dans l’oasis de Timimoun.
Les hommes sont debout en cercle, épaule contre épaule, au milieu se trouve un soliste à la flûte puis le tambour intervient progressivement pour ponctuer les chants polyphoniques, les femmes sont également présentes, assises par le chant et le battement des mains.
Ces chants évoquent l’amour la religion et la vie quotidienne. Le cinéaste algérien, Karim Moussaoui, a consacré un documentaire aux chants de Timimoun, inscrits depuis 2005 au patrimoine mondial de l’UNESCO.
La musique touarègue en Algérie
L’instrument traditionnel emblématique de la musique tourègue est l’imzad, un instrument fait d’une calebasse et d’une seule corde: la musique de l'imzad, caractéristique des populations touarègues, est jouée par les femmes.
La musicienne place l'instrument sur ses genoux et joue en position assise avec un archet. L'imzad fournit l'accompagnement mélodique des chants poétiques ou populaires, souvent chantés par les hommes lors des cérémonies dans les campements touarègues. Il est fréquemment utilisé pour faire fuir les mauvais esprits et atténuer les souffrances des malades ».
Cette musique, qui fait de la femme la gardienne des traditions sociales et musicales touarègues, est pratiquée en Algérie, au Mali et au Niger. L’Algérie encourage la protection de cette pratique musicale de la région du Tassili N’Ajjer et de l’Ahaggar par la promotion de la pratique de l’imzad qui s’inscrit dans le patrimoine culturel mondial de l’UNESCO. Il existe actuellement une association intitulée Sauver l’imzad fondée par Sedik Khetalli. En plus de l’Algérie, les communautés touarègues expriment leur culture musicale en Lybie, au Mali, au Niger et au Burkina Faso.
À l'inverse de la musique traditionnelle de l’imzad, Nabil Baly et ses musiciens proposent un son de guitare moderne : « Il y a une vingtaine d’années la guitare a fait une révolution très particulière dans le sud du désert du Sahara, et son esprit est toujours très vivant. Comme les révolutions du rock’n’roll de 57, 67 et 77, ce bouleversement a concerné la jeunesse, l’attitude, la tribu et l’identité » (Andy Morgan, livret de l’album Amassakoul, 2004).
Nabil Baly, chanteur, auteur, compositeur est né Nabil Othmani en 1985 à Djanet, à l’extrême sud-est du désert algérien. Son père, Baly, était un célèbre virtuose du luth qui avait sa propre troupe musicale. Nabil en a fait partie puis a entamé sa carrière musicale à la mort de son père. Il pratique la guitare depuis l’âge de 13 ans et s’avère excellent soliste.
Les albums les plus connus du groupe Nabil Baly sont Tamghartin (2010) et Ayt ma (2012). L’originalité de ce groupe est de se démarquer du style du célèbre groupe malien Tinariwen en associant leur culture touarègue à la musique populaire algérienne et à d’autres genres musicaux. Nabil Baly a notamment joué avec le trompettiste de jazz, Ibrahim Maalouf.
Ainsi, la musique saharienne d’Algérie est de tradition ancestrale et s’exprime en amazigh, en arabe et en tamasheq, la langue touarègue. Elle est également l’expression de la modernité par une révolution du jeu de la guitare électrique initié par le groupe Tinariwen, créé lors d’un festival à Alger en 1982.
Ce groupe touareg originaire de Tasselit initiateur de la musique assouf, exprime en tamasheq la solitude et l’amour du désert mais aussi la rébellion des Touaregs lors de leur exil en Algérie, pays qui a été un tremplin pour le développement de leur style de musique devenu désormais emblématique du blues du désert.
Liens :
pdf https://www.culturealgerie.com/bechar-capitale-de-la-saoura/ http://www.reporters.dz/culture/item/59666-musique-patrimoine-souad-asla... lemma-des-chants-feminins-de-la-saoura
www.radioalgerie.dz>news-article l’ahellil de TimimounFrance musique, chronique d’Aliette Laleu La Voix des Femmes du Gourara en Algérie
URL : http://www.unesco.org/culture/ich/RL/
https://www.holidway.com/musique-du-sahara/pays/maroc/#:~:text=Instrumen....
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Édité par Lamine BA
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